Equipe de veille Russie: Ilinka Léger, Enzo Padovan, Arnaud Huss, Nicolas Girard, Corentin Delon, Olga Shevchuk
31/10/2022 : La Nouvelle-Zélande sanctionne des producteurs d’armement russes et des groupes pro-Moscou – Enzo Padovan
Le 31 octobre, Nanaia Mahuta, ministre des Affaires étrangères néozélandaise, a annoncé de nouvelles sanctions à l’encontre d’entités affiliées au pouvoir russe. Le ministère détaille ainsi, sur son site, les raisons qui l’ont amené à sanctionner ces 14 individus et 7 organisations : «L’invasion illégale et injustifiée de l’Ukraine par la Russie, ainsi que ses actes répétés d’agression sont alimentés par son vaste réseau militaro-industriel, qui est constitué d’un grand maillage de protagonistes», a expliqué Nanaia Mahuta. Parmi les entités concernées, on retrouve deux médias en particulier, InfoRos et NewsFront, proches du gouvernement de Vladimir Poutine. Le second est d’ailleurs directement basé en Crimée occupée par la Russie depuis 2014. Sont aussi inclus dans les sanctions des groupes paramilitaires, qualifiés de «néo-nazis» par le gouvernement néo-zélandais, et rattachés au groupe mercenaire Wagner, ou encore des producteurs de missiles russes.
Selon le journal Meduza, média indépendant russophone, les groupes sanctionnés ne pourront plus pénétrer sur le territoire néo-zélandais, et leurs actifs sont gelés dans le pays. Novaïa Gazeta Europe, aussi un journal d’opposition au Kremlin en exil, spécifie que Wellington avait déjà soutenu des mesures similaires par le passé. A titre d’exemple, le 11 octobre, le pays avait mis en place des restrictions sur diverses industries russes, en accord avec les décisions prises par ses alliés européens, qui continuent d’affaiblir l’économie du Kremlin.
01/11/2022 : Les Nations Unies adoptent une proposition de résolution déposée par la Russie contre la course à l’armement dans l’espace – Nicolas Girard
Le 01 novembre, la Première commission de l’Assemblée Générale des Nations Unies portant sur le désarmement et la sécurité internationale a adopté un projet de résolution porté par la Russie sur des «mesures pratiques pour prévenir une course à l’armement dans l’espace extra-atmosphérique». D’après le ministère russe des Affaires étrangères, cette résolution vise à pacifier l’espace et éviter son utilisation pour des conflits entre puissances : «Un certain nombre d’États et leurs alliés poursuivent une politique de déploiement d’armes dans l’espace, […] et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique pour des opérations de combat». Pour rappel, le Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, adopté en 1967 par la majorité des pays du monde, ne donne pas de précision sur l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique pour des manœuvres militaires. Dès 2008, la Chine et la Russie avaient proposé un projet de traité sur «le non-déploiement des armes dans l’espace et le non-emploi de la force contre les objets cosmiques» dans le cadre de la conférence annuelle du désarmement, qui avait été rejeté, notamment par les Etats-Unis. La résolution adoptée le 1 novembre devrait être étudiée par l’ensemble des membres de l’Assemblée Générale de l’ONU en décembre 2022.
01/11/2022 : Les officiels russes annoncent la fin de la mobilisation sans publier d’Oukase – Arnaud Huss
Le 1 novembre, le président russe Vladimir Poutine a souhaité confirmer la fin de la mobilisation, malgré l’absence d’Oukase pour mettre officiellement fin au recrutement : “Elle est terminée, le point final est mis”. Pour rappel, cette mobilisation avait été annoncée par un décret présidentiel de Vladimir Poutine, le 21 septembre dernier. Selon le journal russe Vedomosti, le ministère de la défense russe a déclaré dès le 28 octobre par la voix de Sergueï Choïgou que la mobilisation était terminée. La chaîne de télévision gouvernementale russe Tvzvezda a elle aussi relayé les propos du ministère de la Défense en rapportant que la mobilisation partielle aurait permis de recruter pas moins de 318 000 réservistes en Russie et que «le nombre de volontaires ne faiblit pas». Selon le ministre de la Défense russe, Sergueï Choïgou, 82 000 des dernières personnes mobilisées auraient déjà été envoyées en Ukraine. Le reste des personnes mobilisées seraient en cours de formation dans des camps d’entraînement militaires. Toujours selon Tvzveda, chaque réserviste russe mobilisé reçoit une solde de 195 000 roubles mensuel.
Or selon le média russe Mediazona et le journal français Le Monde la mobilisation aurait touché non pas 300 000 hommes, comme annoncé par le décret, mais 492 000 hommes. En effet, au mois d’octobre 2022, différents médias de presse régionaux et installés à l’étranger auraient constaté l’augmentation significative du nombre de mariages, comme en république de Bouriatie et ont appuyé leur chiffrage du nombre de mobilisés sur ces mariages de dernières minutes. La loi russe permet au conjoint du couple marié, de recevoir les pensions, en cas de décès ou d’invalidité.
02/11/2022 : Reprise du trafic ferroviaires entre la Russie et la Corée du Nord – Corentin Delon
Le 2 novembre, le service de presse du Far Eastern Railway rapportait la reprise officielle de la circulation ferroviaire entre la Russie et la Corée du Nord, interrompue par l’épidémie de la Covid-19 depuis janvier 2020. Relayée par le média russe Interfax, cette nouvelle réaffirme la relation économico-culturelle étroite entre les deux nations. En effet, la Corée du Nord est historiquement une grande importatrice de chevaux de race russe (trotteurs Orlov) qui ont un poids considérable sur la culture et la communication politique du régime (figure du mythique Chollima, cheval blanc, mouvement Chollima…). Le communiqué du Far Eastern Railway du 2 novembre nous apprenait ainsi que «le premier train composé de trois wagons spéciaux a envoyé 30 chevaux pur-sang en RPDC».
Dans le contexte d’un rapprochement entre les deux pays, le journal sud-Coréen Daily NK a émis l’hypothèse d’importations en Corée du Nord de blé et de gaz en échange d’un soutien aux manœuvres russes en Ukraine. Cette supposition repose en grande partie sur le fait que la Corée du Nord a reconnu courant juillet les républiques autoproclamées de Donetsk et Lougansk comme des États indépendants et souverains aux yeux du droit international. Far Eastern Railway à également indiqué dans son communiqué que «le prochain envoi est prévu pour fournir des médicaments dans des conteneurs» sans cependant donner plus de détails ou de dates.
02/11/2022 : Le ministère russe des Affaires étrangères publie une déclaration sur la guerre nucléaire – Nicolas Girard
Le 2 novembre, le ministère russe des Affaires étrangères a publié sur son site internet une déclaration sur la prévention de la guerre nucléaire. Ce communiqué affirme que «la Russie est strictement et systématiquement guidée par le postulat de l’inadmissibilité d’une guerre nucléaire». Cependant, ce message vise également à mettre en garde les quatre autres puissances nucléaires officielles contre «les tentatives dangereuses d’empiéter sur les intérêts vitaux des uns et des autres, en se balançant au bord d’un conflit armé direct». Cette déclaration officielle des autorités russes fait écho à l’Oukase 355 du Président Vladimir Poutine du 2 juin 2020 renouvelant la doctrine nucléaire russe. En effet, la déclaration rappelle que la Russie ne souhaite pas utiliser sa force nucléaire qu’en cas de danger ou d’attaque, elle pourrait en faire usage. En outre, cette publication du ministère des Affaires étrangères russe intervient seulement quelques jours après que la Russie s’est opposée à une résolution de la Première Commission de l’Assemblée Générale des Nations-Unies portée par le Japon et visant à «établir un plan d’action commun pour l’avènement d’un monde exempt d’armes nucléaires».
03/11/2022 : L’AIEA ne trouve aucune preuve de préparation de «bombe sale» en Ukraine – Enzo Padovan
Le 3 novembre, l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Atomique) a publié les résultats de son enquête sur les accusations de «bombe sale», en Ukraine. D’après le journal Svoboda, ce terme désigne un dispositif explosif, associé à un isotope radioactif. Ainsi, lorsque la charge est détonnée, les produits radioactifs se déversent dans l’environnement. Le 23 octobre, Sergueï Choïgou, ministre russe de la Défense, avait formulé des accusations à l’encontre de Kyiv à propos de ce type de bombes. Entre-temps, l’AIEA a ouvert un dossier sur ces allégations, se rendant sur trois sites soupçonnés d’héberger la production de ces bombes. Rafael Mariano Grossi, directeur de l’Agence, a commenté les résultats en ces termes : «notre évaluation technique et scientifique des résultats dont nous disposons, jusqu’à présent, n’ont pas révélé de signe d’activité et de matériel nucléaires non déclarés à ces trois emplacements».
Les scentifiques de l’Agence ont cependant effectué des prélèvements d’échantillons sur ces trois sites, qui seront examinés dans les prochaines semaines. Cette enquête a d’ailleurs été ouverte à la demande directe de l’Ukraine, qui a salué ces résultats lorsqu’ils ont été publiés. Dmytro Kouleba, ministre ukrainien des Affaires étrangères, s’est exprimé sur Twitter en ces termes : «la Russie a confirmé son statut de plus grand menteur du monde». Selon le journal indépendant Meduza, au soir du 3 novembre, Moscou n’avait pas commenté le rapport de l’AIEA.
03/11/2022 : Le Comité des droits de l’homme de l’ONU appelle la Russie à réviser un certain nombre de lois – Olga Shevchuk
Le 3 novembre, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a publié un document contenant les observations finales sur la dernière année d’observation du respect des droits de l’homme en Russie. Le document note de nombreuses violations par la Russie des droits fondamentaux tels que le droit à la vie, la liberté, la protection contre la torture et l’absence de discrimination. Les experts font état d’une préoccupation particulière concernant le conflit armé en Ukraine : «un recours excessif à la force, de meurtres, d’exécutions extrajudiciaires et sommaires, de disparitions forcées, de tortures, de viols et de violences sexuelles, de détentions arbitraires, de conscription forcée de civils, de déplacements massifs de population.»
Le document parle également d’un projet de loi interdisant «la propagande LGBT» et appelle à renoncer à son adoption. Le Comité a ainsi souligné la stigmatisation institutionnalisée des personnes LGBT en Russie, «notamment par le biais de la loi de 2013 “sur la propagande des relations sexuelles non traditionnelles entre mineurs” et de son amendement approuvé en première lecture par le Parlement pour interdire le “déni des valeurs familiales” et la “promotion des orientations sexuelles non traditionnelles” à tous les âges.»
La déclaration appelle, entre autres, à cesser immédiatement de harceler les journalistes, les militants, les avocats et les défenseurs des droits de l’homme, d’enquêter sur les cas de violence, les tentatives de discrédit et les tentatives d’assassinat sur leur vie.