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VEILLE SUD-CAUCASE – Du 5 février au 11 février 2022

05-11/02/2022 : Polémique arméno-azerbaïdjanaise au sujet du patrimoine culturel du Karabakh sur fond d’escarmouches à la frontière.

Suite à l’annonce du 3 février faite par le ministre de la Culture azerbaïdjanais, Anar Karimov, de la constitution d’un groupe de travail qui aurait été décrit comme chargé de «supprimer les traces fictives écrites par les Arméniens sur les temples religieux albanais», une nouvelle déclaration a été émise le 7 février, qu’il a expliqué par «de fausses informations émis par des médias étrangers partiaux au cours des derniers jours», et qui précise le projet de l’État azerbaïdjanais en parlant d’un «groupe de travail chargé d’étudier ce patrimoine» et en avançant que «si des falsifications sont identifiées, elles seront documentées avec la participation d’experts internationaux et présentées à la communauté internationale». Le ministère des Affaires étrangères arménien a vivement réagi le 8 février par la voix de son porte parole Vahan Hounanian qui a déclaré: «Cela démontre une fois de plus le fait que les cas de vandalisme et de destruction du patrimoine historique, culturel et religieux arménien au Haut-Karabakh pendant la guerre de 44 jours et la période suivante sont délibérées et pré-planifiées, et font partie de la politique d’anéantissement de la population arménienne indigène du Haut-Karabakh» tandis que de nombreuses ONG arméniennes ont lancé un appel aux autorités pour qu’elles notifient les mesures prises par l’Azerbaïdjan auprès de la Cour internationale de Justice des Nations-Unies et pour qu’elles s’adressent aux organes compétents de l’ONU dont l’UNESCO pour organiser une visite en « Artsakh ». De même, le ministère des Affaires étrangères de facto d’ « Artsakh » a publié une déclaration le 8 février condamnant la décision azerbaïdjanaise et affirmant que «la falsification de l’histoire et le génocide culturel par l’Azerbaïdjan font partie d’une politique anti-arménienne plus large qui est régulièrement mis en œuvre depuis des décennies […] les machinations de l’histoire et de la culture ont servi d’excuses à l’expulsion forcée de la population arménienne de l’ex-RSS d’Azerbaïdjan, elles visent maintenant à légitimer les conséquences de l’utilisation illégale de la force militaire de l’Azerbaïdjan contre l’Artsakh».

Le 11 février, le ministère des Affaires étrangères azerbaïdjanais a également réagi en dénonçant des tentatives arméniennes de détournement de l’accord conclu le 4 février concernant les visites prévues et acceptées par les deux parties de missions de l’UNESCO, en soulignant que l’Azerbaïdjan sollicitait l’UNESCO depuis 20 ans pour une telle mission empêchée par l’Arménie et qu’elle attendait que cet organisme enquête également sur le patrimoine culturel azéri en Arménie.

Parallèlement de nombreux échanges de coups de feux ont été enregistrés de part et d’autre assortis des démentis habituels par les deux parties, l’Arménie dénonçant des tirs en direction des ouvriers d’usine d’Askeran le 5 février, ou sur plusieurs maisons à Karmir Shuka et Taghavard dans la région de Martouni le 11 février, et l’Azerbaïdjan dénonçant des bombardements sur le village de Gapanli, dans la région de Terter dans la nuit du 6 au 7 février, ou sur le village de Zeylik dans la région de Kelbadjar le 11 février.

06-08/02/2022 : Soutien russe à la candidature d’Anatoli Bibilov à sa réélection en Ossétie du sud.

Le 06 février, Anatoli Bibilov, le président de facto d’Ossétie du sud a déclaré sur la chaîne de télévision russe Russia 24 que l’unité du peuple ossète était plus importante que l’indépendance, en expliquant que les Ossètes du sud et du nord formait «un seul peuple avec des traditions, des coutumes et une langue commune» et que l’intégration de l’Ossétie du sud à la Russie était «la volonté de notre nation depuis les années 1920». Il a rappelé les mesures prises dans le cadre du programme « Cinq étapes vers la Russie » en mentionnant les augmentations de salaires pour les fonctionnaires et les militaires, et les réformes du service des douanes. Il a également exprimé le souhait de «relations amicales et de bon voisinage avec la Géorgie» marquée par une «réciprocité entre égaux» et souligné l’obstacle lié au refus géorgien de signer un accord de «non recours à la force». Le 8 février, les exercices militaires tactiques d’une longue série devant se poursuivre durant 3 semaines dans le district militaire sud (Abkhazie, oblast de Volgograd, kraï de Stravopol, Adyguée, Tchétchénie, Daghestan, Karatcheïvo-Tcherkessie, Ossétie du nord et Ingouchie) ont été organisés par la Russie dans la république de facto. Le même jour, le secrétaire général du parti « Russie Unie », Andreï Turchak, s’est rendu à Tskhinvali pour soutenir la candidature de Anatoli Bibilov du parti « Ossétie Unie » à sa réélection le 10 avril prochain et a notamment déclaré que ce dernier avait «l’expérience et les connaissances nécessaires à la construction de l’État, un bon potentiel personnel pour le développement actif des relations russo-sud-ossètes et la mise en œuvre du programme de développement socio-économique». Parmi les personnalités venues le soutenir figuraient le chef de la République d’Ossétie du nord, Sergueï Méniaïlo, ainsi que les présidents de la « république populaire de Donetsk » de facto et de la « république populaire de Lougansk » de facto, Denis Pouchiline et Denis Kolesnikov.

Pour rappel, les autorités sud-ossètes avancent le chiffre de 48 000 Ossètes vivant en Ossétie du sud (pour 460 000 en Ossétie du nord – Alanie) et 30 000 Géorgiens ont dû quitter le territoire suite au conflit armé de 1991-1992 et de la guerre russo-géorgienne de 2008.

07/02/2022 : Libération de 8 prisonniers de guerre arméniens sans contrepartie pour l’Azerbaïdjan sur la localisation des fosses communes de la première guerre.

Suite à la discussion du 4 février en visioconférence qui a réuni les présidents arménien et azerbaïdjanais, le président français, Emmanuel Macron, et le président du Conseil européen Charles Michel, 8 prisonniers de guerre arméniens, dont les 6 prisonniers restant en captivité depuis le 16 novembre 2021, ont été libérés et rapatriés le 7 février à bord d’un avion français, ce qui a été salué notamment par Javier Colomina, représentant spécial du secrétaire général de l’OTAN pour le sud-Caucase et l’Asie centrale, par les ambassadeurs français en Arménie et en Azerbaïdjan, Anne Louyot et Zacharie Gross, par le représentant spécial de l’UE pour le sud-Caucase, Toivo Klaar, et par la représentante officielle du ministère des Affaires étrangères russe, Maria Zakharova qui a soutenu le principe du « tous contre tous » et souligné les résultats des recherche de corps depuis la présence des soldats de la paix russes au Karabakh, soit 146 personnes retrouvées dont 127 Arméniens et 19 Azerbaïdjanais. Cette rencontre qui s’inscrit dans la continuité de celle du 14 décembre dernier à Bruxelles et qui a abordé les questions humanitaires, les mesures de confiance, le problème des mines terrestres, l’ouverture des communications, la délimitation et la démarcation des frontières et le début des pourparlers sur un traité de paix, a fait l’objet d’un communiqué commun d’Emmanuel Macron et de Charles Michel qui ont réaffirmé ensemble leur «plein engagement à soutenir les efforts visant à réduire les tensions».

Le président Ilham Aliev a particulièrement insisté au cours de cette réunion sur le sort des 3890 citoyens azerbaïdjanais portés disparus durant la première guerre dont 71 enfants, 267 femmes et 326 personnes âgées et sur la nécessité de localiser les fosses communes. Les parties se sont aussi mis d’accord sur l’envoi d’une mission de l’Unesco dans les deux pays. Si Emmanuel Macron a déclaré via Twitter «libération des détenus, efforts partagés dans la recherche des disparus, travaux à venir pour la réhabilitation des voies ferrées : depuis nos réunions de décembre à Bruxelles avec l’Arménie et l’Azerbaïdjan, les progrès sont là. Vers l’apaisement et la confiance, nous continuons», les critiques se sont fait entendre dès le 8 février par la partie azerbaïdjanaise devant l’absence de communication arménienne concernant le sort des disparus azerbaïdjanais. Le communiqué publié par le MAE azerbaïdjanais appelle la communauté internationale à faire pression sur l’Arménie pour qu’elle «assume la responsabilité de clarifier le sort des citoyens azerbaïdjanais disparus, héritage sanglant de la première guerre arméno-azerbaïdjanaise». Le ministre des affaires étrangères azerbaïdjanais, Djeyhun Bayramov, a notamment déclaré le lendemain lors d’une conférence de presse commune avec son homologue moldave, « le premier ministre arménien a promis de coopérer dans ce domaine. Ensuite, nous avons vu la déclaration illogique du ministre arménien des Affaires étrangères. C’était une déclaration absurde, incompatible avec toute morale, humanité ou droit international. Il a été déclaré que l’Arménie n’avait fait aucune promesse à cet égard. L’Azerbaïdjan continuera d’insister sur cette question. Nous pensons qu’il est temps d’augmenter la pression internationale sur l’Arménie dans cette direction» ou « e respect par l’Arménie de ses obligations dans ce domaine peut être évalué à zéro pour cent». Cette question intervient alors que l’Azerbaïdjan s’apprête à commémorer le 26 février prochain le massacre de Khodjali par les forces armées arméniennes en 1992.

07/02/2022 : Les déclarations du président biélorusse Alexandre Loukachenko en direction du sud-Caucase donnent lieu à des interprétations variées.

Au cours d’une interview avec le journaliste russe Vladimir Soloviov, le 7 février, le président biélorusse, Alexandre Loukachenko, s’est livré à plusieurs déclarations sujettes à polémique concernant le sud-Caucase. Il a notamment déclaré qu’il fallait une extension de l’État de l’Union entre la Russie et la Biélorussie à l’ensemble des anciennes républiques socialistes soviétiques et a évoqué l’Arménie en ces termes : «l’Arménie n’a nulle part où aller…quoi ? vous pensez que quelqu’un a besoin d’eux? Ils l’ont déjà vu, Nikol Voyevich [Pachinian] l’a déjà vu». Par ailleurs, il aurait déclaré ne pas exclure de reconnaître l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du sud, à l’instar de la Russie en répondant à la question en ces termes : «Est ce qu’il y a besoin de ça ? [la reconnaissance des républiques] Dès que j’aurai compris et que le président [Vladimir Poutine] me dira qu’il y a un besoin pour cela…».

Dès le lendemain, l’ambassadeur de Biélorussie en Arménie, Alexandre Konyuk, s’est rendu au ministère arménien des Affaires étrangères, et son porte parole, Vahan Hounanian, a apporté une réponse à ces propos en ces termes : «Il est certain que les analyses géopolitiques du président biélorusse visent avant tout à servir son agenda politique national et n’ont rien à voir avec l’Arménie et sa politique étrangère» tandis que les députés pro-gouvernementaux se sont livrés à de vives critiques de ces propos au Parlement, en insistant sur la participation arménienne à l’intervention de l’OTSC au Kazakhstan le mois dernier ou en posant la question de savoir qui avait besoin de Alexandre Loukashenko, le député Rustam Bakoyan déclarant «je pense que cette question rhétorique lui a été posée par son peuple».

Le ministère des affaires étrangères géorgien a répondu par la voix de sa porte parole, Mari Narchemashvili, en expliquant que compte tenu des relations bilatérales entre les deux pays, la reconnaissance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du sud «n’étaient pas à l’ordre du jour» et que «la Biélorussie à cet égard reste fidèle aux principes fondamentaux du droit international» prétextant aussi une manipulation des médias russes. La veille, le ministère des Affaires étrangères de facto de l’Abkhazie avait déclaré évaluer positivement les déclarations du président biélorusse et s’est dit ouvert «à un dialogue à grande échelle avec des États amis de la Russie» et intéressé à l’établissement de contacts officiels avec la Biélorussie. Dimitri Peskov, le porte parole du président de la Fédération de Russie, a déclaré par la suite que le Kremlin n’enverrait aucun signal dans ce sens et que leur «allié et partenaire décidera seul quand il le jugera approprié».

Pour rappel, Minsk envisageait en 2009 de reconnaître les deux républiques sécessionnistes à la suite de la Russie après la guerre de 2008 avant de changer d’avis,ce qui avait été expliqué par le refus de la Russie de partager les conséquences négatives de ce geste en terme de sanctions internationales. Le 9 février, Mikheïl Saakashvili s’est exprimé à ce sujet lors d’une audience au tribunal municipal de Tbilissi en expliquant que l’absence de reconnaissance de l’indépendance des deux républiques de facto par la Biélorussie était le résultat d’une «diplomatie secrète» qu’il aurait mené par le biais de plusieurs rencontres avec son homologue biélorusse à Londres.

08/02/2022 : Ratification de la nouvelle loi « Sur les médias » en Azerbaïdjan.

Le 8 février, Ilham Aliev a ratifié la nouvelle loi « sur les Médias » adoptée par le Parlement le 30 décembre dernier et qui avait fait l’objet de nombreuses manifestations d’opposition de la société civile azerbaïdjanaise et de nombreuses critiques internationales qui se sont renouvelées en fin de semaine par la voix du Commissaire européen aux Droits de l’Homme, du Comité pour la protection des journalistes à New York, par l’ambassade des États-Unis en Azerbaïdjan, ou encore le Comité norvégien d’Helsinki. Cette loi prévoit la mise en place d’un registre des médias, le remplacement du Conseil national de la télévision et de la radio par un Conseil de l’audiovisuel, l’accréditation des journalistes étrangers par le ministère des Affaires étrangères, une modification de la Charte de l’Agence de développement des médias désormais habilitée à dresser des avertissements aux médias en ligne pour violation de cette loi, à suspendre leurs activités et la distribution de leurs journaux, et à délivrer les certificats d’inscription aux registres des organes de presse suite à un «test» dont le contenu n’a pas été révélé. En outre, cette loi prévoit des restrictions importantes à l’activité des médias situés en dehors du pays et dont le public cible se trouve en Azerbaïdjan puis qu’elle impose aux propriétaires de médias diffusant dans ce pays d’y résider et d’avoir la nationalité azerbaïdjanaise. Il sera également obligatoire de publier plus de 20 articles par jour pour être légalement reconnu en tant que média. L’Azerbaïdjan est classé au 167ème rang sur 180 pays en terme de liberté de la presse, selon Reporters sans Frontières. Cette loi est actuellement à l’étude par la Commission de Venise depuis le 2 février.

08/02/2022 : la Cour Européenne des Droits de l’Homme commence à examiner les plaintes individuelles des Géorgiens contre la Russie suite à la guerre de 2008.

Le 8 février, la CEDH a commencé à examiner 59 plaintes individuelles déposées par des citoyens géorgiens contre la Russie concernant la guerre russo-géorgienne de 2008, qui concernent plus de 350 victimes de déplacements forcés et qui sont relatifs à des violation de droits en matière de protection de la vie privée et familiale, de droits de propriété, de liberté de mouvement et d’interdiction de discrimination. Les questions adressées à la Russie attendent une réponse pour le 12 mai prochain. En 2021, un verdict distinct a été rendu par la CEDH concernant une affaire entre les deux États, entraînant la demande de paiement de 10 millions d’euros par la Russie à son adversaire pour le préjudice moral subi par 1500 ressortissants géorgiens du fait de la violation de 6 articles différents de la Convention européenne des Droits de l’Homme. 408 citoyens géorgiens sont morts durant ce conflit qui a également fait 26 000 déplacés internes.

08-10/02/2022 : Visite du vice-premier ministre de Moldavie en Azerbaïdjan.

Le vice premier ministre et ministre des Affaires étrangères et de l’Intégration européenne moldave, Nicu Popescu, est arrivé le 8 février à Bakou à l’invitation de son homologue azerbaïdjanais Djeihoun Bayramov, dans le but de «renforcer la coopération entre les deux pays dans les domaines du commerce, de l’économie, de l’investissement et de l’énergie dans le contexte de l’importance stratégique du corridor gazier sud». La question de l’ouverture de vols directs entre les deux pays a été discuté. Nicu Popescu a remercié son homologue pour l’aide apportée aux hôpitaux moldaves durant la pandémie et a exprimé son souhait d’aider l’Azerbaïdjan dans le processus de déminage du Karabakh. Il s’est également entretenu le 10 février avec le président azerbaïdjanais Ilham Aliev.

09/02/2022 : l’Abkhazie transmet sa demande de statut d’observateur à l’ONU.

Le 9 février, le ministre des Affaires étrangères de la République d’Abkhazie de facto, Inal Ardzinba, s’est rendu à Moscou où il a rencontré Alexeï Borisov, vice-président de l’association russe pour les Nations Unies afin de lui transmettre un appel destiné à Antonio Guttierez, secrétaire général de l’ONU, afin que l’Abkhazie obtienne le statut d’observateur à l’ONU à l’instar de la Palestine et du Saint-Siège, ce qui lui permettrait de participer aux discussions de l’Assemblée Générale de l’ONU. Cet appel a été qualifié de «geste de propagande» par Mari Narchemashvili, porte parole du ministère des Affaires étrangères géorgien.

09/02/2022 : Classement des pays du sud-Caucase selon l’indice de la démocratie publié par l’Economist Intelligence Unit.

La publication de l’Indice de Démocratie 2021 publié le 10 février par l’Economist Intelligence Unit a fait état d’un classement de l’Azerbaïdjan comme « régime autoritaire » à la 141ème place sur 167 pays et d’un classement de l’Arménie et de la Géorgie comme « régime hybride » respectivement à la 89ème et à la 91ème place. L’Arménie est le seul des trois pays à enregistrer une progression pour la poursuite de son programme de réforme démocratique.

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