Équipe de veille Asie Centrale : Alexandre Brière, Aliya Yechshanova, Julie Eifler-Bolander.
20/11/2022 : Réélection du président Kassym-Jomart Tokaïev dans un contexte de réformes constitutionnelles – Alexandre Brière.
Le 20 novembre, des élections présidentielles anticipées ont eu lieu au Kazakhstan conformément au référendum constitutionnel du 5 juin 2022. Comme l’indique la chaîne de télévision kazakhe 24.kz, le président kazakh Kassym-Jomart Tokaïev a été réélu pour un second mandat, après avoir remporté 81,31% des voix, comme indiqué par la Commission électorale centrale du pays. D’après les données préliminaires, la participation était de 69,44%, soit plus de 8,2 millions de votants sur environ 12 millions d’électeurs inscrits. Plus tôt, le 6 octobre, le président sortant Tokaïev avait été nommé candidat à la présidence de la Coalition populaire composée du parti Amanat, principal parti politique du Kazakhstan, fondé par l’ancien président Noursoultan Nazarbaïev sous le nom de Nour-Otan, le Parti démocratique du Kazakhstan (Ak Jol) et le Parti populaire du Kazakhstan (QHP), comme rapporté par le service de presse indépendant Radio Azattyk. Ce scrutin intervient dans un contexte de profondes réformes constitutionnelles initiées par le chef d’État Tokaïev, parmi lesquelles notamment la réduction du mandat présidentiel à sept ans non renouvelables ou la signature d’une loi qui a redonné à la capitale du Kazakhstan son ancien nom d’Astana. Le président Tokaïev prévoit une révision de l’ensemble des institutions politiques du pays pour ainsi renforcer les pouvoirs du Parlement et entend instaurer un meilleur respect des droits de l’Homme. De plus, il affirme que sa réélection annonce l’avènement d’une nouvelle ère de prospérité, de stabilité et d’unité nationale, tout en mettant fin à l’hyper-présidentialisation du régime. Enfin, le président kazakh s’efforce de renforcer ses relations diplomatiques et stratégiques avec la Chine, mais aussi avec l’Union européenne et la Turquie, afin de contourner les répercussions économiques et financières du conflit russo-ukrainien toujours en cours.
21/11/2022 : Visite officielle du président de la République d’Ouzbékistan à Paris dans le cadre du développement des relations entre l’Union européenne et l’Asie centrale – Alexandre Brière.
Les 21 et 22 novembre, à Paris, a eu lieu une rencontre entre le président de la République française Emmanuel Macron et le président de la République d’Ouzbékistan, Shavkat Mirziyoyev. Comme rapporté par le service de presse du Ministère des Affaires étrangères de la République d’Ouzbékistan, ces discussions marquent le trentième anniversaire de la normalisation des relations diplomatiques entre l’Ouzbékistan et la France. Les deux chefs d’État ont également manifesté leur volonté de renforcer la coopération bilatérale dans le domaine de la sécurité, de la lutte contre le terrorisme international, d’accroître la coopération commerciale, économique et d’investissement, en augmentant notamment le volume du chiffre d’affaires commercial, le nombre de projets et de programmes conjoints impliquant des technologies de pointe. D’après l’agence d’information ouzbèke Uzreport.news, plusieurs accords économiques ont été signés au cours de la visite, notamment dans les secteurs de l’énergie, de la gestion de l’eau, des transports et du tourisme. À cet égard, ils ont insisté sur la nécessité de consolider la coopération industrielle, comme spécifiée dans la feuille de route économique de la France et de l’Ouzbékistan pour 2020-2030. Sur le plan culturel, les deux parties ont convenu d’accélérer le processus de création d’une nouvelle Alliance française à Samarcande. Ces discussions préparent la tenue du deuxième Forum universitaire franco-ouzbek, qui se tiendra à Paris les 27 et 28 novembre 2022. Enfin, comme indiqué par le média ouzbek Gazeta.uz, le président ouzbek a clôturé son déplacement officiel par la participation à l’inauguration de l’exposition «Splendeurs des oasis d’Ouzbékistan» au musée du Louvre et «Sur les routes de Samarcande. Merveilles de soie et d’or» à l’Institut du Monde Arabe à Paris.
21/11/2022 : Rencontre entre le président du Turkménistan et le président des Émirats arabes unis dans le cadre du renforcement des relations bilatérales – Alexandre Brière.
Les 21 et 22 novembre, à Abou Dhabi, capitale des Émirats arabes unis, s’est tenue une rencontre entre le Président de la République du Turkménistan, Serdar Berdimuhamedow et le vice-Premier ministre des Émirats arabes unis, ministre des Affaires présidentielles et membre de la famille royale d’Abou Dabi, Mansour ben Zayed Al Nahyane. D’après le service de presse du Ministère des Affaires étrangères de la République du Turkménistan, ces discussions interviennent dans un contexte de renforcement des relations bilatérales entre le Turkménistan et les États arabes du Golfe et se sont conclues par la signature de nombreux accords relatifs à la consolidation d’un nouveau partenariat stratégique sur le long terme. Selon le média turkmène Turkmenportal.com, au cours de cette rencontre, les deux chefs d’État se sont longuement entretenus sur les nouveaux plans d’action en matière d’accords bilatéraux liés aux corridors de transport, notamment sur l’intensification des échanges économiques et commerciaux entre les ports internationaux de Türkmenbaşy (province de Balkan, à l’ouest du Turkménistan) et d’Abou Dhabi. D’après le service de presse russe SNG.Today, il a été également question de la création d’une banque conjointe avec des bureaux de représentation étatiques dans les deux pays, dans le but de développer les partenariats d’investissement. À cet égard, les deux parties ont exprimé leur intention d’accroître les efforts mutuels dans les secteurs stratégiques tels que le pétrole, le gaz, le raffinage du pétrole, l’industrie chimique et les énergies renouvelables. Un intérêt commun pour le renforcement de la coopération bilatérale a également été exprimé dans les domaines culturel et humanitaire, grâce à la promotion des sciences, de l’éducation et des événements artistiques et sportifs.
21/11/2022 : Engagement du Tadjikistan à participer à des exercices antiterroristes conjoints avec la Chine – Julie Eifler-Bolander.
Le 21 novembre, le média Eurasianet a rapporté que le gouvernement tadjik s’est engagé à participer conjointement à des exercices anti-terroristes avec les forces chinoises. Si le journal affirme qu’en 2016, des installations militaires chinoises avaient déjà été établies à l’est du Tadjikistan, près de la frontière avec l’Afghanistan, chose systématiquement niée par les autorités, cet engagement officiel représente aujourd’hui un véritable pas en avant dans la coopération entre les deux pays. À l’occasion de la réélection du président Xi Jinping en République Populaire de Chine fin octobre, le président tadjik Emomali Rahmon avait d’ailleurs exprimé son impatience pour «le renforcement des relations sino-tadjikes d’amitié, de bon voisinage et de partenariat stratégique global» dans son télégramme de félicitations, disponible sur le site officiel du Ministère des Affaires étrangères tadjik. Parallèlement, le président chinois semble chercher à «dominer» l’Asie et à y «réduire l’influence américaine», d’après les mots du journal TajikistanNews, et cela passe visiblement par des partenariats, surtout dans la défense. D’ailleurs, ce média rapporte aussi que les États-Unis sont inquiets de cette volonté d’influence chinoise, et comptent sur leur capacité à proposer des liens économiques pour la ralentir. Cependant, le Tadjikistan semble plutôt vouloir s’inscrire dans des partenariats de défense avec les grandes puissances voisines. À ce titre, le média AsiaPlus a évoqué des rencontres récentes entre le Tadjikistan et la Russie dans le cadre de leur partenariat stratégique, afin de le renforcer, notamment sur les aspects du contreterrorisme et de la cybersécurité.
22/11/2022: Douchanbé et Moscou renforcent la coopération en matière de sécurité et de renseignement – Aliya Yechshanova.
Selon le service de presse du dirigeant tadjik, le président Emomali Rahmon a eu des entretiens avec le directeur du service de renseignement étranger de la Fédération de Russie, Sergueï Naryshkin, qui est arrivé au Tadjikistan le 22 novembre. Les interlocuteurs ont examiné les questions d’actualité liées à la sécurité fiable dans la région.
Les parties se sont concentrées sur un partenariat mutuellement bénéfique des pays par le biais des services spéciaux, ayant activement renforcé les liens diplomatiques pendant plus de trente ans. Dans ce contexte, l’importance de renforcer la coopération dans le domaine de l’action commune contre les attaques terroristes, l’extrémisme et la criminalité transnationale, y compris le trafic de drogues et d’armes, a été soulignée, ainsi que la cybercriminalité et d’autres menaces à la sécurité nationale.
En outre, ils ont pu échanger sur leurs vues sur les questions de poursuite de l’harmonisation des actions dans la lutte contre les menaces actuelles de la modernité liées aux tendances de propagation de l’idéologie de l’extrémisme religieux.
23/11/2022 : Nomination du premier Secrétaire général kazakh de l’Organisation du Traité de Sécurité Collective (OTSC) – Alexandre Brière.
Le 23 novembre, à Erevan, capitale de l’Arménie, dans le cadre du sommet de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), l’ancien ministre de la Défense kazakh Imangali Tasmagambetov a été désigné au poste de secrétaire général de l’organisation à compter du 1er janvier 2023, comme rapporté par le service de presse du gouvernement du Kazakhstan. Cette nomination a été annoncée par le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan lors de l’ouverture du sommet de l’OTSC. Après avoir été Premier ministre du Kazakhstan de 2002 à 2003 et ministre de la Défense de 2014 à 2016, Imangali Tasmagambetov a été Vice-Premier ministre de 2016 à 2017 puis ambassadeur du Kazakhstan en Russie de 2017 à 2019. Il est le premier diplomate kazakh à occuper la fonction de Secrétaire général de l’OTSC pour une période de 3 ans et succède ainsi au diplomate et général biélorusse Stanislav Zas. Comme indiqué par l’agence de presse internationale kazakhe Kazinform, cette nomination intervient à la suite de la réélection le 20 novembre du président de la République du Kazakhstan, Kassym-Jomart Tokaïev, lui-même présent lors de la session du Conseil de sécurité collective de l’OTSC. À ce jour, l’OTSC, organisation à vocation politico-militaire créée le 7 octobre 2002, rassemble six États : l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, la Russie et le Tadjikistan, qui sont tous des membres fondateurs de l’organisation. D’après le service de presse de l’OTSC, les principales directives initiées par l’organisation portent sur la sécurité collective des États membres, la coopération militaire, la défense de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale, le maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité dans l’espace eurasiatique, sur la lutte contre le terrorisme international, la prolifération d’armes de destruction massive et la criminalité transnationale (trafic d’êtres humains, immigration clandestine, trafic d’armes et de narcotiques).
23/11/2022 : Restrictions à la liberté de la presse et d’expression dans le cadre de l’expulsion d’un journaliste d’investigation au Kirghizistan – Alexandre Brière.
Le 23 novembre, le tribunal municipal de Bichkek a annoncé l’expulsion du journaliste kirghize Bolot Temirov. D’après le service de presse indépendant Radio Azattyk, la Cour a jugé le journaliste coupable de falsification de passeport et de carte d’identité militaire. De plus, le tribunal s’est prononcé en faveur de son expulsion vers la Russie, car outre la nationalité kirghize, il détient aussi la nationalité russe. Enfin, il est également accusé de trafic de drogue et de s’être illégalement rendu sur le territoire du Kirghizistan. Bolot Temirov est un journaliste d’investigation politiquement engagé en faveur de la défense des droits de l’homme au Kirghizistan et il enquête sur les affaires de corruption dans le pays. Comme indiqué par le service de presse de l’ambassade des États-Unis au Kirghizistan, le gouvernement américain a considéré l’expulsion du journaliste comme une grave atteinte aux principes démocratiques. De plus, la rapporteuse spéciale sur les défenseurs des droits de l’homme, Mary Lawlor, a appelé les autorités kirghizes à mettre fin à l’expulsion de Temirov, en rappelant que la liberté d’expression est officiellement reconnue et défendue par la Constitution du Kirghizistan. En janvier 2020, il avait fondé le média «Temirov Live» sur YouTube, qui enquête et dénonce la corruption d’acteurs étatiques et non-étatiques au Kirghizistan. Selon l’agence de presse internationale Fergana.agency, le 22 janvier 2022, neuf policiers masqués avaient fait irruption sans mandat à son domicile à Bichkek et avaient procédé à une perquisition de tous les appareils informatiques du journaliste. Le 17 mai 2022, Bolot Temirov a été déchu de sa nationalité kirghize par le ministère de l’Intérieur. Sous couvert de lutte contre la désinformation, les journalistes et les militants de la société civile qui sont critiques à l’égard des autorités au Kirghizistan sont souvent victimes de manœuvres de harcèlement et d’intimidation. Certains font même l’objet de poursuites pénales sans le moindre fondement, comme rapporté par le service de presse de l’organisation non gouvernementale Amnesty International.
24/11/2022 : “Jour de la Fierté Mongole” et 860ème anniversaire de la naissance de Gengis Khan – Julie Eifler-Bolander.
Le 24 novembre s’est tenu le «Jour de la Fierté Mongole», en l’honneur du 860ème anniversaire de la naissance de Gengis Khan. Suite à une cérémonie officielle devant sa statue, comme rapporté par les nombreux tweets du Grand Khoural (Parlement) de Mongolie et sur son site officiel, une session honorifique parlementaire s’est tenue en présence du président de Mongolie et du Premier ministre. En effet, comme expliqué dans un tweet du Parlement, l’article 21.1 du statut du Grand Khoural prévoit la tenue d’une «réunion spéciale […] pour célébrer les anniversaires historiques et les évènements inextricablement liés à l’histoire, l’indépendance et la souveraineté de la Mongolie». Le président du Grand Khoural, Gombojavyn Zandanshatar, s’est exprimé à cette occasion pour souligner l’héritage moral et politique de Gengis Khan, et le fait que son «souci du peuple» devrait inspirer les dirigeants mongols, précision apportée par le média mongol News. Le président Khürelsükh a quant à lui affirmé l’importance de cette journée pour «protéger la liberté, l’indépendance et l’unité» du pays.
Les jours précédents, plusieurs conférences ont permis de faire le point sur l’avancée des recherches en études mongolisantes, comme rappelé par le journal d’Etat Montsame. Ces évènements s’inscrivent dans le contexte plus large d’une certaine volonté de diffusion de l’histoire mongole : décret du président de la Mongolie instituant la célébration de l’héritage de Gengis Khan dans tous les foyers, ouverture d’un nouveau musée baptisé «Chinggis Khan» (nom de Gengis Khan en mongol), et remise à différents chercheurs mongolisants étrangers de l’ordre de «Chinggis Khan», ce qu’ont rapporté les médias Gogo et News.