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Guerre asymétrique : le conflit israélo-iranien se déplace au Yémen.

Publié le 02/09/2025
5 min de lecture
Par Lucas Calmon Miranda
Asie de l'ouest et Monde arabe

La guerre de 12 jours et la crise diplomatique liée au programme nucléaire iranien ont quelque peu modifié la dynamique du conflit israélo-iranien en cours. Après une série d’échanges de missiles balistiques ayant provoqué plus de 1 000 morts et la destruction massive d’infrastructures, les solutions diplomatiques semblent plus que jamais compromises. Bien qu’un statu quo se soit installé entre les deux parties, les dégâts causés de part et d’autre sont inédits et la menace nucléaire demeure. Néanmoins, la rapidité de la désescalade a démontré leur réticence à entrer en confrontation directe. Faute de moyens ou crainte existentielle, les deux ennemis préfèrent se recentrer sur les objectifs de la guerre par procuration qu’ils se mènent dans la péninsule Arabique et en Palestine.

Alors qu’Israël se concentre sur l’éradication totale du Hamas à Gaza, les tensions avec l’axe de résistance chiite se sont globalement déplacées au Yémen. Depuis que les États-Unis ont bombardé l’usine d‘enrichissement d’uranium de Fordow en Iran, le Moyen-Orient connaît une recrudescence de tentatives de frappes houthistes sur Tel-Aviv. Les Houthis ont visé à plusieurs reprises l’_blank" rel="noopener">aéroport de Ben Gourion. En réponse, l’entité sioniste a mené, à son tour, des bombardements sur des points stratégiques autour de la capitale yéménite. L’armée de l’air israélienne a déclaré, à la fin du mois de juillet, avoir bombardé des sites houthistes dans le port de Hodeïda.

Ces attaques s’inscrivent également dans le cadre des tensions dans la mer Rouge, provoquées par le blocus houthiste sur le commerce international et principalement israélien. Le 10 juin, la marine israélienne avait ouvert un front maritime actif aux abords des côtes yéménites et avait mené, pour la première fois, une opération principalement navale, afin de répondre à la menace houthiste sur le commerce maritime israélien. Fin juillet, la milice chiite avait annoncé, à son tour, qu’elle entrait dans la 4ᵉ phase de son blocus contre Israël et menaçait d’attaquer tout navire commercial ayant effectué des arrêts dans des ports israéliens. 

Actuellement, Israël accuse les Houthis d’avoir utilisé des bombes à sous-munitions (BASM), pourtant interdites par la Convention d’Oslo sur les armes à sous-munitions (2008). Les autorités israéliennes affirment que les missiles utilisés lors de l’offensive du 22 août sur Tel-Aviv et Ashkelon se seraient démantelés en plein vol. Si cette affirmation s’avère vraie, les Houthis auraient fait usage de nouvelles technologies, de surcroît interdites, afin d’augmenter leur force de frappe sur Israël. Selon le CENTCOM, les forces nationales de résistance yéménites ont intercepté un cargo transportant 750 tonnes d’armement en provenance d’Iran. Cette saisie constitue un record, selon le département de la Défense américain. Elle indique que le trafic d’armes entre Ansar Allah et la République islamique n’a pas diminué, malgré l’affaiblissement des Gardiens de la Révolution. Au contraire, le flux pourrait avoir augmenté si l’on se fie aux paroles du « Conseiller aux affaires internationales du Guide suprême». Le 9 août, dans une interview accordée à l’agence Tasnim, Ali Akbar Velayati a affirmé que les Houthis étaient la « perle» de la résistance. De son côté, la milice chiite a réaffirmé son soutien et son allégeance totale à Ali Khamenei.

Israël semble, de son côté, intensifier ses attaques sur Sanaa. Le 25 août, une frappe israélienne sur la capitale yéménite a entraîné la mort du Premier ministre houthiste, de plusieurs civils, ainsi que la destruction des alentours du palais gouvernemental. L’État israélien aurait aussi visé de nouveaux points stratégiques, tels que les centrales Asar et Hizaz et un site de stockage de carburant. Ces bombardements ont servi de réponse aux drones et aux missiles BASM envoyés par les Houthis sur Tel Aviv quelques jours plus tôt. 

L’évolution du conflit israélo-iranien tend vers une intensification de la guerre par procuration au Yémen. Dernier bastion de l’axe de résistance hors de la zone tampon en Irak, le pays occupe une place stratégique : la multiplication des attaques en mer Rouge et les frappes croisées entre Houthis et Israël témoignent de son importance croissante. En misant sur le verrou maritime que représente le détroit de Bab el-Mandeb, l’Iran cherche à accroître la vulnérabilité d’Israël et à l’entraîner dans un conflit prolongé, coûteux et asymétrique. Si la réponse reste pour l’instant limitée, la résilience houthiste et la géographie favorable à la guérilla laissent entrevoir le risque d’une escalade vers un nouveau front régional. 

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