Erdoğan au sommet de l’OCS à Tianjin.

Erdoğan au sommet de l’OCS à Tianjin
La participation du président Recep Tayyip Erdoğan au 25ᵉ sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), qui s’est tenu à Tianjin les 31 août et 1er septembre 2025, a illustré la volonté d’Ankara de consolider son rôle dans un monde multipolaire. En marge de l’événement, Erdoğan a mené une série d’entretiens bilatéraux stratégiques avec des dirigeants de la Chine, de la Russie, de l’Iran, du Pakistan, ainsi qu’avec l’Azerbaïdjan et l’Arménie.
Dialogue avec Pékin
Avant le sommet, Erdoğan avait publié dans le People’s Daily un article intitulé « A Shared Path to Peace and Justice », où il avait souligné l’importance de la solidarité internationale menée par la Chine. Reçu par le président Xi Jinping, il a plaidé pour un commerce plus équilibré, des investissements accrus dans les nouvelles technologies, l’énergie, la santé et le tourisme, ainsi que pour l’harmonisation du Corridor central avec l’Initiative « Ceinture et Route ».
Pour sa part, le président Xi Jinping a décrit la Chine et la Turquie comme des « puissances émergentes dotées d’un esprit d’indépendance » et comme des acteurs du Sud global. Il a souligné que le 55ᵉ anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques en 2026 devait être l’occasion de renforcer la confiance mutuelle et la coopération, y compris en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Le président chinois a également proposé d’élargir la coopération dans les domaines de l’énergie renouvelable, de la 5G et de la biomédecine, tout en renforçant la coordination dans les enceintes multilatérales telles que l’ONU, le G20, les BRICS et l’OCS.
Erdoğan a ensuite rencontré Cai Qi, premier secrétaire du Secrétariat du Comité central du PCC. Il a rappelé sa volonté de renforcer la coopération avec Pékin non seulement sur le plan bilatéral mais aussi dans les plateformes multilatérales. Il a fixé pour objectif d’augmenter les échanges commerciaux bilatéraux de manière équilibrée et durable.
Moscou et l’énergie
Avec le président Poutine, les discussions ont porté sur les crises régionales et la coopération énergétique. Erdoğan a notamment évoqué le financement de la centrale nucléaire d’Akkuyu, tandis que Poutine a loué le rôle d’Ankara dans la médiation du conflit ukrainien.
Dialogue régional avec l’Iran et le Pakistan
Erdoğan a également rencontré son homologue iranien Massoud Pezeshkian, réaffirmant la coopération énergétique et le soutien de la Turquie aux négociations nucléaires. Avec le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif, il a mis en avant la coopération en matière de sécurité et de défense et a dénoncé la politique israélienne à Gaza, affirmant une convergence de vues entre Ankara et Islamabad.
Le Caucase au cœur des discussions
Le président turc a enfin échangé avec le président Aliyev et le président Pachinian. Il a salué les progrès du processus de paix Bakou–Erevan et a réaffirmé la volonté d’Ankara de contribuer à la stabilité et au développement du Caucase du Sud.
Une diplomatie multidimensionnelle
Ces rencontres ont traduit la stratégie d’Ankara : préserver ses alliances occidentales tout en renforçant ses liens avec l’Est. La Turquie a cherché ainsi à se positionner comme médiateur régional, partenaire énergétique et acteur du Sud global, promouvant un ordre international plus multipolaire et plus juste.
Cette approche a illustré la volonté d’Erdoğan d’adopter une diplomatie d’équilibre, où Ankara ne se limite pas à un axe unique mais multiplie les partenariats en fonction de ses intérêts stratégiques. En dialoguant simultanément avec Pékin, Moscou, Téhéran, Islamabad, Bakou et Erevan, la Turquie a confirmé son rôle de puissance intermédiaire capable de parler à des acteurs parfois en opposition directe. Cette posture a accru sa marge de manœuvre diplomatique et a renforcé son profil d’« État pivot » au sein des recompositions géopolitiques actuelles.
En outre, la valorisation des initiatives économiques qu’il s’agisse des corridors énergétiques, des projets d’infrastructures ou de la coopération technologique a montré que la diplomatie turque ne s’articulait pas seulement autour des enjeux sécuritaires, mais s’inscrivait aussi dans une vision de développement régional inclusif. Cette multidimensionnalité a constitué l’un des piliers de la stratégie turque dans un monde en mutation.
À propos de l'auteur
Eren Gokdemir
Passionné de géopolitique, Eren poursuit actuellement une licence de science politique à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Après un début de parcours à Sciences Po Paris, il a pour objectif de se spécialiser dans l’étude de la Turquie et de son aire d’influence. Curieux et engagé, il s’intéresse aux grands enjeux internationaux et à la manière dont ils transforment les équilibres mondiaux.