Construction de la Paix
Etats-Unis
Golfe

Houthis–États-Unis : un cessez-le-feu incertain.

Publié le 28/05/2025
4 min de lecture
Par Lucas Calmon Miranda
Asie de l'ouest et Monde arabe

Le 6 mai, Donald Trump a annoncé sur Right Side Broadcasting Network la capitulation du régime houthi face aux États-Unis et la mise en place d’un cessez-le-feu entre les deux parties. L’accord a été conclu sous la médiation du sultanat d’Oman, dans un contexte où la désescalade était attendue de part et d’autre. Selon le site officiel du ministère omanais des Affaires étrangères : « À l’avenir, aucune des deux parties ne ciblera l’autre, y compris les navires américains, dans la mer Rouge et le détroit de Bab al-Mandab, garantissant ainsi la liberté de navigation et la fluidité du commerce maritime international. » Lors de son intervention, le président américain a affirmé que l’objectif de la mission américaine avait été atteint. Reuters annonce que le cessez-le-feu aurait été sollicité par les Houthis via des canaux du renseignement américain. Un responsable américain, s’exprimant sous couvert d’anonymat, a déclaré : « Nous avons commencé à recevoir des informations selon lesquelles les Houthis en avaient assez. »

Plusieurs doutes subsistent concernant le positionnement américain dans la région après l’annonce du cessez-le-feu. L’accord n’a donné lieu à aucun document écrit et paraît nettement informel. Trump confirme son oralité lors de son

intervention médiatique : « Nous prendrons leur parole. Ils disent qu’ils ne feront plus exploser de navires. » En l’absence d’engagement formel, la pérennité du cessez-le-feu entre les deux parties et sur les navires commerciaux reste incertaine. Par ailleurs, l’efficacité de l’opération Rough Rider menée par Washington est questionnable, au vu de l’écart entre les moyens déployés et le résultat obtenu : le coût de cette offensive dépasse le milliard de dollars, selon CNN. Au total, deux porte-avions ont été mobilisés dans la mer Rouge, six bombardiers B-2 et plus de 1 000 missiles ont été utilisés en trois semaines pour parvenir à un statu quo fragile. Un tel déploiement massif paraît disproportionné face à une menace qui n’affectait qu’environ 3 % du commerce maritime américain. Même en supposant que la stratégie américaine visait des objectifs plus larges, comme faire pression sur l’Iran ou protéger Israël, les résultats restent très limités. Cette démonstration de force n’a pas permis non plus d’obtenir les concessions iraniennes attendues sur le dossier nucléaire. Enfin, si les États-Unis cherchaient à dissuader toute attaque contre Israël, l’opération est également un échec : les Houthis ont revendiqué plusieurs bombardements sur Tel-Aviv depuis l’annonce du cessez-le-feu.

Parallèlement, les Houthis se targuent d’avoir résisté à l’offensive américaine et démentent leur capitulation sur Al Masirah. Le leader du mouvement affirme que l’opération Rough Rider est un échec et que, de leur côté, le cessez-le-feu découle d’une volonté stratégique de se recentrer sur la guerre contre Israël. On ne saurait pour autant les déclarer vainqueurs : la milice a subi de nombreux dégâts, notamment sur le terminal pétrolier de Ras Isa, bombardé le 17 avril par l’US Air Force. La coalition américano-britannique a également détruit un ensemble d’immeubles servant à la production de drones militaires. Au total, Washington a frappé entre 800 et 1 000 cibles, incluant des officiels, tel que le chef du renseignement houthi, et de nombreux bâtiments stratégiques. L’ampleur réelle des dégâts reste méconnue, mais la milice a sans doute été affaiblie à la suite des frappes américaines.

Ainsi, le cessez-le-feu a permis de mettre un terme à un conflit qui devenait coûteux pour les deux camps. Si les pourparlers ont réussi à contenir la menace houthie sur le commerce maritime de la mer rouge, le désengagement des Etats-Unis, en revanche,  recentre les représailles de la milice sur Israël, notamment par des bombardements réguliers. De son côté, Ansar Allah a évité le pire, en choisissant la désescalade, mais sont-ils militairement prêts à affronter l’armée israélienne ? 

À propos de l'auteur

Lucas Calmon Miranda

Lucas Calmon Miranda

Biographie non renseignée

Auteur vérifié

Articles à lire dans cette rubrique

Recevez nos analyses géopolitiques directement dans votre boîte mail

Pas de spam, désabonnement en un clic

Houthis-Etats-Unis : un cessez-le-feu incertain