La FINUL vers sa fin : un retrait programmé pour 2027 au Liban

La FINUL vers sa fin : un retrait programmé pour 2027 au Liban
Le 28 août 2024, le Conseil de sécurité des Nations Unies a voté ce qui devrait être la dernière prolongation du mandat de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL). Cette mission, créée en 1978 et largement renforcée après la guerre de 2006, est appelée à se retirer progressivement, avec une échéance fixée à août 2027. Les États-Unis, appuyés par plusieurs alliés occidentaux, ont plaidé pour ce retrait, arguant d’un mandat devenu inefficace et coûteux. Le Liban, lui, se retrouve face à l’incertitude quant à l’avenir de sa sécurité dans le Sud, alors même que les tensions entre Israël et le Hezbollah se sont ravivées à l’automne 2024.
Une mission née de la guerre et institutionnalisée par la résolution 1701
La FINUL a été initialement créée en mars 1978 à la suite de l’opération « Litani », lancée par Israël contre l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Son mandat, défini par les résolutions 425 et 426, visait à confirmer le retrait israélien du Sud-Liban et à restaurer l’autorité de Beyrouth sur la zone frontalière.
Depuis lors, la FINUL a constitué un pilier de la stabilité relative du Sud-Liban, en jouant un rôle tampon entre Israël et le Hezbollah. Cependant, les critiques sont régulières quant à son efficacité réelle, en particulier en raison de son incapacité à désarmer le Hezbollah, dont l’arsenal n’a cessé de croître depuis 2006.
Une situation aggravée en 2024
Le 23 septembre 2024, une flambée de violence inédite depuis 2006 a opposé Israël au Hezbollah. En riposte à des tirs de roquettes massifs depuis le Sud-Liban, l’armée israélienne a lancé une offensive aérienne et terrestre limitée. Les affrontements, concentrés autour de Bint Jbeil et Marjayoun, ont duré deux jours et causé des centaines de morts, dont une majorité de civils.
Malgré une désescalade rapide sous la pression internationale, ce nouvel épisode a démontré la fragilité de la situation et les limites du mandat de la FINUL. Les contingents de Casques bleus, bien que déployés dans la zone tampon, n’ont pas été en mesure d’empêcher les échanges de tirs ni de protéger pleinement les civils. Pour Washington et Tel-Aviv, cet échec a confirmé que la présence onusienne ne constituait plus un facteur de dissuasion crédible. Le représentant américain à l’ONU a ainsi plaidé pour un retrait ordonné mais définitif de la FINUL d’ici 2027, considérant que le statu quo ne fait qu’entretenir une illusion de stabilité.
Le Sud-Liban toujours sous tension alors que la FINUL prend fin
Si l’annonce d’un retrait progressif peut sembler rationnelle sur le plan diplomatique et budgétaire, elle soulève néanmoins de nombreuses inquiétudes pour la stabilité du Liban et de la région.
Depuis 2006, la FINUL a joué un rôle de soutien essentiel à l’armée libanaise (LAF) dans le Sud. Or, les capacités de cette dernière restent limitées, notamment en matière logistique et de renseignement. Sans l’appui de la mission onusienne, il est peu probable que Beyrouth puisse exercer une pleine souveraineté sur la zone frontalière. La réduction de l’influence de l’État libanais pourrait ouvrir la voie à un regain d’autonomie du Hezbollah dans la région.
Malgré les pertes subies en septembre 2024, le Hezbollah conserve une forte implantation dans le Sud-Liban. Son rôle social et militaire lui assure une résilience notable. Un retrait de la FINUL pourrait donc être interprété par le mouvement comme une opportunité de renforcer son emprise sur la zone frontalière, voire de relancer ses capacités offensives contre Israël.
Une résolution 1701 inachevée, entre retrait programmé et incertitudes régionales
Le départ de la FINUL en 2027 signifierait de facto l’abandon des objectifs centraux de la résolution 1701, notamment l’interdiction de toute présence armée autre que celle de l’État libanais au sud du Litani. Or, cet objectif n’a jamais été atteint, et la situation sécuritaire demeure incertaine. Le risque est donc celui d’un vide sécuritaire qui raviverait les tensions, avec pour conséquence une nouvelle confrontation armée entre Israël et le Hezbollah.
La fin annoncée de la FINUL en 2027 marque la conclusion de l’une des plus longues missions de maintien de la paix de l’ONU. Si son efficacité a souvent été contestée, elle a néanmoins contribué à éviter une reprise à grande échelle des hostilités depuis 2006. Son départ, voulu notamment par les États-Unis, pourrait laisser un vide sécuritaire difficile à combler pour le Liban, dont les institutions sont fragilisées par la crise économique et politique.
Dans un contexte régional déjà tendu par la guerre à Gaza, la rivalité irano-israélienne et l’instabilité syrienne, la disparition d’un mécanisme de contrôle international risque de faire basculer le Sud-Liban dans une nouvelle zone de confrontation. Reste à savoir si un dispositif alternatif, régional ou bilatéral, pourra succéder à la FINUL afin de maintenir un minimum de stabilité.
À propos de l'auteur
Nans AMAIL
Passionné par les relations internationales, la diplomatie multilatérale et la géopolitique, je m’intéresse particulièrement au rôle global des Nations Unies face aux enjeux sécuritaires contemporains. Au sein d’EURASIAPEACE, je travaille sur la thématique : « Les Nations Unies face aux menaces contemporaines et hybrides », en apportant une analyse critique sur l’évolution des formes de conflictualité et la capacité d’adaptation des institutions internationales.
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