Sun Lijun – Ancien vice- ministre de la Sécurité publique

Date de naissance : 13/01/1969
Lieu de naissance : Shanghai, Chine
Fonctions : 1. Vice-ministre de la Sécurité publique (2018-2020)
2. Directeur du Bureau des affaires de Hong Kong, Macao et Taïwan du ministère de la Sécurité publique
3. Directeur adjoint du Bureau 610
4. Membre du Comité du Parti du ministère de la Sécurité publique
5. Vice-président de la Société de droit de Chine
Introduction
Né le 13 janvier 1969 à Shanghai, Sun Lijun a été l’une des pièces maîtresses de l’appareil sécuritaire chinois sous Hu Jintao. Relais entre l’ancien système de gestion collégiale et l’ère de centralisation absolue incarnée par Xi Jinping, il a d’abord adopté les normes rigides du système avant d’en transgresser les règles tacites : en 2022, il devient l’archétype du haut-fonctionnaire chinois tombé en disgrâce. Ancien vice-ministre de la Sécurité publique, acteur-clé de la répression intérieure et stratège clandestin du contrôle social, il a été à maintes reprises un rouage influent de la machine sécuritaire du Parti communiste chinois. Formé à l’étranger, et ancré dans des réseaux de pouvoir parallèles, il a perfectionné l’art de la coercition furtive: surveillance algorithmique, neutralisation des voix dissidentes, infiltration des structures sociales, actions en coulisses. Par le biais de la surveillance, il a mis en place un suivi permanent et anticipé des comportements: les voix dissidentes ont été discrètement réduites au silence par la censure, l’intimidation et l’exclusion sociale. En infiltrant des ONG, universités et groupes religieux, il a installé un réseau de contrôle au cœur même de la société. Ainsi, Sun Lijun a déployé plus de 200 000 caméras à reconnaissance faciale à Shanghai, et supervisé des arrestations d’intellectuels-critiques. Toutefois, comme la confiance, toujours, est conditionnelle, Sun Lijun fait l’objet de suspicions : accusé en 2020 de corruption massive, de factionnalisme et d’atteinte à l’harmonie du PCC, il chute dans un crépuscule kafkaïen. Dans cette perspective, la confiance n’est jamais absolue : elle demeure soumise aux conflits d’intérêts, et se retire dès qu’un individu, aussi influent soit-il, devient une menace pour l’équilibre ou l’autorité centrale. Se dessinent, dès lors, les lignes de fracture d’un régime soucieux du contrôle disciplinaire, y compris de ses propres concepteurs. Officier devenu paria, Sun Lijun illustre la dialectique ambivalente du pouvoir chinois : une œuvre où les artisans se confondent parfois avec les fondations qu’ils ont eux-mêmes façonnées. Un système où les cadres peuvent être pris au piège des structures qu’ils ont eux-mêmes servies.
Biographie
Issu d’un milieu modeste empreint d’une discipline familiale rigoureuse, Sun Lijun grandit à Shanghai au tournant des années 1970-1980. Alors que s’ouvre l’ère du Petit Timonier, la Chine entre dans une transformation profonde, marquée par une libéralisation progressive, l’ouverture aux capitaux étrangers et une urbanisation accélérée: une force de mutation que certains observateurs occidentaux résumaient d’ores-et-déjà par la formule d’Alain Peyrefitte – “Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera” (1973). Ainsi, dès son plus jeune âge, Sun Lijun fut immergé dans un contexte structurant entre progressisme modernisant et exigence politique. Très vite, Sun Lijun révèle une nette inclination pour les sciences politiques et juridiques et décide d’intégrer l’université chinoise de la sécurité publique (PPSUC) à Pékin, vivier de l’élite policière du régime. Formé au droit pénal, au renseignement ainsi qu’aux techniques de maintien de l’ordre, Sun Lijun complète son parcours par un master en santé publique à l’Université de Nouvelle-Galles du Sud, à Sydney. Cette parenthèse internationale, relativement peu fréquente dans les cercles sécuritaires chinois, lui apporte une expertise diversifiée en gestion urbaine, prévention des risques et outils contemporains de contrôle social.
Carrière politique
Sun Lijun initie son parcours technocratique au début des années 1990 en intégrant le bureau des Affaires étrangères du bureau municipal de la Santé de la ville de Shanghai, puis au bureau des Affaires étrangères du gouvernement populaire de Shanghai. Il s’agit de ses débuts dans l’appareil sécuritaire : ses fonctions lui confèrent une première exposition à la gestion administrative et aux relations sensibles, en particulier avec Macao, Hong Kong et Taïwan (tensions post-rétrocession). Alors que la Chine est en train de se moderniser et de réorganiser son système de sécurité pour faire face aux nouveaux défis – protestations sociales, montée des technologies de l’information, ouverture économique – attirent l’attention des échelons supérieurs en raison de sa polyvalence.
Au tournant des années 2000, la carrière de Sun Lijun prend un nouvel élan. Il rejoint l’institution centrale du contrôle intérieur en Chine: le ministère de la Sécurité publique (MSP). Chargé du renseignement domestique, du maintien de l’ordre et de la surveillance sociétale, le MSP occupe un rôle clef dans l’application des orientations sécuritaires du régime. Sun Lijun devient un instrument phare de la stratégie de la “stabilité sociale” promue par le Parti dans une Chine confrontée à des tensions internes croissantes. Il assume la responsabilité de la Direction du Bureau de la sécurité politique intérieure, une entité dédiée à l’observation des intellectuels, des activités, des organisations non gouvernementales et des mouvements religieux perçus comme « déviants ». Par la suite, il est relié à une structure extralégale dédiée à la répression du Falun Gong : le bureau 610. En sa fonction de spécialiste du renseignement intérieur, Sun Lijun coordonne des opérations de surveillance, d’arrestation et de “rééducation” en s’appuyant sur des méthodes intrusives alliant coercition psychologique et propagande. C’est à cette époque qu’il a su se faire un nom en tant qu’homme de l’ombre: sa capacité à traiter les dossiers sensibles du Parti avec discrétion a été un atout majeur pour sa future ascension dans l’appareil sécuritaire chinois. Il consolide ses réseaux dans les cercles sécuritaires en approfondissant son expertise dans la gestion des menaces intérieures.
L’apogée d’une carrière
Le 28 mars 2018, Sun Lijun est officiellement nommé vice-ministre de la sécurité publique et devient un des plus jeunes à occuper ce poste stratégique. Placé au cœur de la gestion sécuritaire du pays, il veille au maintien de l’ordre public, à la surveillance et au contrôle de la population, au renseignement intérieur, à la lutte contre les mouvements dissidents, à l’encadrement des crises, et à la coordination avec les autres organes de sécurité du Parti. A ce stade, Sun Lijun devient la figure montante du Parti: un technocrate, expert de ses sujets, et politicien soutenu par de vastes réseaux internes. Lors des campagnes anti-corruption lancées par Xi Jinping, Sun Lijun devient le nouvel artisan de la recomposition du régime: il supervise la mise en place de système de surveillance de nouvelle génération, conciliant vidéosurveillance, intelligence artificielle, et collecte massive de données personnelles. Parallèlement, il est impliqué dans les campagnes de neutralisation des voix dissidentes , dans la répression des défenseurs des droits humains, et dans la manipulation subtile des réseaux sociaux pour contrôler le discours public.
Réseaux et allégeances
L’une des caractéristiques notables de la trajectoire professionnelle de Sun Lijun est son ancrage dans des réseaux d’influence, parfois en compétition avec les institutions établies. Ces mêmes réseaux liés à des clans internes du Parti, mêlent des intérêts personnels, des loyautés fluctuantes et des stratégies de survie politique. Associé à une connaissance approfondie des outils modernes de contrôle, son profil le positionne au cœur des campagnes répressives du régime. Cependant, cette position le rend également vulnérable aux rivalités internes, ou la méfiance est omniprésente.
La chute et les condamnations
Avril 2020. Sun Lijun est placé sous enquête par la Commission centrale de contrôle de la discipline du Parti communiste chinois, organe chargé de superviser l’intégrité des cadres du Parti. Officiellement accusé de “gang s graves de la discipline et de la loi”, il est progressivement mis en cause pour une série de délits d’une gravité exceptionnelle: acceptation de pots-de-vin à hauteur de 646 millions de yuans, soit environ 91 millions de dollars; manipulation illégale du marché boursier; possession non autorisée d’armes à feu; ainsi qu’abandon de poste au début de la pandémie du Covid-19, une faute jugée intolérable dans un contexte de mobilisation nationale.
En septembre 2022, il est condamné à la peine de mort avec un sursis de deux ans – une formule judiciaire souvent utilisée pour les hauts responsables politiques en Chine, et généralement commuée en réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. En outre, au-delà de ses délits personnels, Sun Lijun est accusé d’avoir formé et dirigé un groupe d’influence interne au Parti – le “gang Sun Lijun” – regroupant plusieurs hauts fonctionnaires également tombés en disgrâce, à l’instar de l’ancien ministre de la Justice, Fu Zhenghua. Les circonstances exactes de son arrestation demeurent énigmatiques. En revanche son procès a été présenté par le régime comme un exemple de fermeté contre la corruption et la division interne. Cette chute médiatisée a marqué une étape importante dans la centralisation du pouvoir autour de Xi Jinping : elle a illustré les risques permanents encourus par les cadres dans un système où la méfiance règne en maître.
Conclusion
Cette disgrâce s’inscrit dans une série de purges visant à consolider la mainmise de Xi Jinping au sein de l’appareil sécuritaire. A l’heure actuelle, il apparaît vraisemblable que Sun Lijun soit incarcéré dans la prison de Qincheng, située dans les faubourgs septentrionaux de Pékin. Ce pénitencier, qui se distingue par son niveau de sûreté élevé, est destiné à l’incarcération des personnalités ayant perdu leur crédit, à l’instar de Bo Xilai, Chen Xitong ou encore Zhou Yongkang
Dernière mise à jour : 30/05/2025
Noah VIDON
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À propos de l'auteur
Noah VIDON
Diplômé en Relations Internationales et Sciences-politiques, Noah nourrit une passion ardente pour l’analyse géopolitique et la prospective stratégique. Sa fascination pour l’Asie, creuset de cultures et acteur clé de l’échiquier mondial, aiguise son ambition. Fort d’un regard multiculturel, il aspire à servir une action publique innovante, au cœur des politiques étrangères de demain.