Guo Shengkun – Ancien secrétaire de la Commission des Affaires politiques et juridiques du PCC

Date de naissance : 06/10/1954
Lieu de naissance : Xingguo, province du Jiangxi, Chine
Fonctions : 1. Secrétaire de la Commission des Affaires politiques et juridiques du PCC (2017-2022) 2. Ministre de la Sécurité Publique (2012-2017) 3. Membre du Bureau politique du Comité central du PCC (2017-2022) 4. Secrétaire du Comité du Parti pour le Ministère de la Sécurité
Publique 5. Vice-ministre du Travail (1990-2000)
Introduction
Relativement discret sur la scène médiatique et dépourvu de notoriété publique, Guo Shengkun a pourtant occupé ces dernières décennies des postes stratégiques au cœur de l’appareil sécuritaire de la République populaire de Chine. Ancien ministre de la Sécurité publique, puis chef de la Commission des Affaires politiques et juridiques du PCC, il a supervisé les leviers les plus sensibles de l’Etat : police, justice, renseignement et propagande. Enfant du Jiangxi, technocrate aguerri formé dans les filières industrielles du Parti, Guo Shengkun incarne le profil-type de l’exécutant : promu pour sa loyauté sans faille, son autorité hermétique et son empreinte durable sur l’action publique. Sous son impulsion, les procédés de concertation entre les différentes entités de domination se renforcent et débouchent sur une union orchestrée entre les instruments de coercition et les instruments juridiques de l’infrastructure du pouvoir. En parallèle, il défend une politique de « stabilité sociale » , fondée sur une centralisation accrue du pouvoir judiciaire et une judiciarisation méthodique des instruments de répression, au service des desseins politiques du régime. Sous son mandat à la tête de la Commission des Affaires politiques et juridiques du Parti (2017-2022), la Chine a vu les dépenses de sécurité intérieure dépasser les 200 milliards de yuans par an, surpassant de facto le budget officiel de la défense. D’autre part, ce sont près de 1,5 million de caméras qui ont été installées, en parallèle de l’augmentation de 40% des procès pour atteinte à la sécurité de l’Etat, en cinq ans. Une gouvernance sans visage, mais non sans poigne.
Biographie
Guo Shengkun naît le 6 octobre 1954 dans le comté enclavé de Xingguo, au cœur de la province du Jiangxi, encore marquée par les séquelles du Grand Bond en avant. A l’âge de vingt ans, alors que la Révolution culturelle poursuit ses convulsions traumatiques et plonge la Chine dans une tourmente idéologique, il intègre le Parti communiste chinois. Cette adhésion ne se résume pas à un simple choix partisan mais insiste d’ores-et-déjà sur la survie et l’ascension auxquels aspirent le jeune homme : fidèle et résilient, discret et d’une fine connaissance des arcanes du pouvoir, Guo Shengkun prêche dans la doctrine du Parti pour une seconde école. Une formation parallèle à son éducation familiale originelle, où il forge patiemment une discipline rigoureuse, une loyauté indéfectible et la maîtrise subtile du “non-dit”. Ce premier pas dans la sphère de pouvoir se double d’une formation académique à l’Université des mines et de la technologie de Chine. Guo Shengkun s’oriente vers un secteur clé de la modernisation industrielle : l’extraction et la transformation des métaux non ferreux – pierre angulaire de l’autonomie stratégique de l’économie chinoise. Après l’obtention de son diplôme, Guo Shengkun entame en 1979 sa carrière dans l’industrie des métaux non ferreux au Jiangxi, au sein du département des machines du ministère de l’industrie métallurgique. Il exerce successivement les fonctions de chef de section, secrétaire du Parti puis de surintendant. De 1985 à 1992, il dirige la mine Huameiao au sein de la China Non-Ferrous Metal Corporation (CNMC), puis prend en charge la direction de la mine d’argent de Guixi. Entre 1993 et 1997, il occupe la fonction de directeur de la succursale de Nanchang de la CNMC, avant d’être promu directeur général adjoint de 1997 à 1998. Entre 1999 et 2000, il renforce sa position à l’intersection des secteurs industriel et administratif et prend en charge la création de la société publique Aluminum Corporation of China Limited (Chinalco), dont il devient le directeur général. Sous son impulsion, la filiale réalise une double introduction en bourse à New York et Hong Kong, illustrant sa capacité à orchestrer la transformation stratégique de l’entreprise vers une envergure internationale. Ces longues années de service à la jonction de l’ingénierie, de la planification industrielle et de la stratégie publique, lui confèrent l’expertise nécessaire dans la maîtrise des enjeux stratégiques liés à l’optimisation des chaînes d’approvisionnement et à la souveraineté énergétique. C’est précisément ce profil technocratique, forgé à l’articulation des impératifs industriels et des logiques de pouvoir, que les autorités centrales choisissent de mobiliser au tournant des années 2000, en le nommant gouverneur de la région autonome du Guangxi.
Le Guangxi
Région frontalière du Vietnam, à la fois carrefour d’échanges licites et informels, le Guangxi concentre une série d’enjeux structurants pour le pouvoir chinois : administration des périphéries, encadrement des populations minoritaires, lutte contre les trafics transfrontaliers et sécurisation des flux de circulation. Face à cette complexité, Guo Shengkun élabore une gouvernance locale fondée sur une articulation fine entre contrôle social, usage ciblé du renseignement et planification du développement. Il s’impose ainsi comme le stratège d’un laboratoire en devenir des dispositifs sécuritaires du régime. Guo Shengkun se hisse progressivement aux échelons supérieurs de l’appareil sécuritaire de l’Etat et cumule les attributs requis.
Carrière sécuritaire
Après avoir exercé des fonctions exécutives de premier plan dans la région autonome du Guangxi entre 2004 et 2012, Guo Shengkun est nommé en décembre 2012, ministre de la Sécurité publique, succédant à Meng Jianzhu. Il prend alors la tête d’un portefeuille central au maintien de la stabilité interne, chargé de coordonner les forces de police, les services de renseignement intérieur et les dispositifs de gestion de la société civile. Sa nomination intervient à un moment clef, marqué par l’émergence de nouvelles formes de contestation sociale, la montée en puissance des réseaux numériques et le recentrage idéologique du Parti autour de la figure de Xi Jinping. Guo Shengkun met progressivement en œuvre un renforcement systématique des capacités de surveillance, tantôt humaines, tantôt technologiques. Il suggère l’intégration de la reconnaissance faciale, du Big Data et des technologies prédictives dans les pratiques policières, au soutien des grandes entreprises nationales à l’instar de Hikvision ou iFlytek. Un virage assumé qui se manifeste notamment par le développement de plateformes comme “Skynet” et “Sharp Eyes” : outils à l’appui du quadrillage de l’espace urbain et rural grâce à des dispositifs de vidéosurveillance interconnectés.
À plus forte raison, sa gestion du ministère se caractérise par une série de campagnes répressives. En 2015, l’opération “709” intimide et soumets quelque 300 avocats spécialisés dans la défense des droits civiques à des procédures judiciaires opaques. Symbole du pilotage stratégique du Parti, cette démarche étend désormais la répression politique au-delà des simples opposants traditionnels pour cibler des intermédiaires juridiques aptes à formuler des contestations en s’appuyant sur le droit. Parallèlement, Guo contribue au resserrement de l’encadrement des ONG étrangères notamment à travers l’adoption en 2017 de la “Loi sur la gestion des ONG étrangères”: cette évolution législative place leurs activités sous la supervision directe du ministère de la Sécurité publique et instaure un cadre plus strict de régulation et de surveillance. De cette manière, l’idée d’une “sécurité sociale globale” (总体国家安全观) centrée sur l’anticipation des menaces non conventionnelles semble se renforcer. D’une part, en 2017, Guo Shengkun est promu secrétaire de la Commission centrale des affaires politiques et juridiques du PCC: chargé de la coordination verticale de l’ensemble des institutions gardiennes de l’ordre et de l’autorité du PCC, il restructure et réduit les espaces d’autonomie bureaucratique en renforçant l’alignement idéologique des magistrats et procureurs. D’autre part, il pilote deux campagnes majeures. Dans un premier temps, la lutte contre le crime organisé sous l’étiquette “Frapper fort le crime mafieux et le mal” (扫黑除恶), enfin, dans un second temps, il lance une vaste campagne de “rectification” des institutions juridiques. Ces mesures poursuivent un double objectif: purger la société chinoise en éliminant les réseaux susceptibles de menacer la stabilité de l’appareil judiciaire tout en inscrivant durablement l’idéologie de Xi Jinping dans la gouvernance juridique – un principe directeur désormais institutionnalisé du “Xi Jinping Thought on Rule of Law”.
Réseaux et héritage
A la fin de la décennie de 2010, Guo Shengkun est un artisan incontournable de l’architecture sécuritaire du régime. Il n’est pas associé à un clan, mais à une orthodoxie: une rigueur, une discipline et une fidélité sans ambiguïté avec la volonté du Sommet de l’Etat. En 2022, à l’âge de 68 ans, Guo Shengkun se retire officiellement de la vie politique et transmet son mandat à Chen Wenqing. Toutefois, son influence persiste et les engrenages du contrôle social qu’il avait alors consolidé, continue de structurer les pratiques gouvernementales.
Conclusion
Guo Shengkun appartient à cette classe essentielle de cadres silencieux qui ont transformé le système sécuritaire chinois en une forteresse algorithmique. A l’inverse de Sun Lijun, Guo Shengkun est l’illustration d’une ascension sans chute, dans la continuité, la prudence et la permanence.
Dernière mise à jour : 17/06/2025
Noah VIDON
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À propos de l'auteur
Noah VIDON
Diplômé en Relations Internationales et Sciences-politiques, Noah nourrit une passion ardente pour l’analyse géopolitique et la prospective stratégique. Sa fascination pour l’Asie, creuset de cultures et acteur clé de l’échiquier mondial, aiguise son ambition. Fort d’un regard multiculturel, il aspire à servir une action publique innovante, au cœur des politiques étrangères de demain.