Un bilan prometteur pour le Premier Forum d’Investissement russo-thaï ?

Un bilan prometteur pour le Premier Forum d’Investissement russo-thaï ?
Du 26 au 28 novembre, le premier forum d’investissement russo-thaï s’est tenu à Phuket, en Thaïlande. D’après le Ministère russe du Développement Economique, 40 sessions thématiques sur différents sujets (tourisme, culture, énergie ou encore secteur de la santé) ont réuni plus de 600 participants issus des deux pays. Parmi ceux-ci, des acteurs majeurs de l’économie russe, tels que Rosatom, étaient représentés pour une rencontre à la valeur stratégique conséquente.
La Russie est un des principaux investisseurs étrangers, avec la Chine, en Thaïlande. Dans le secteur immobilier thaï, 40% des investissements internationaux venaient de Moscou, et la Russie est le premier Etat européen en matière de tourisme à Bangkok. Néanmoins, du propre aveu d’Ivan Demtchenko, directeur du Conseil d’Affaires russo-thaï, les relations commerciales entre ces deux Etats sont « insuffisantes », à hauteur de seulement 1,8 milliards de dollars en 2024. En comparaison, la même année, les douanes vietnamiennes rapportaient des importations en provenance de la Russie à hauteur de 2,25 milliards de dollars.
A l’issue de ce forum, les participants ont noté le fort potentiel des échanges russo-thaïs, mais ont insisté sur le besoin d’un cadre juridique précis pour favoriser cette coopération. Sans celle-ci, le commerce continuera à souffrir des limites imposées par l’absence d’un accord de libre-échange, par exemple. Parmi les opportunités identifiées, certains secteurs économiques sont davantage mis en avant. La Thaïlande pourrait bénéficier de nouveaux partenariats pour son secteur de la santé (un des plus gros d’Asie du Sud-Est), mais aussi pour sa son tourisme et sa transition numérique. La partie russe espère développer davantage le e-commerce avec Bangkok, tout en investissant davantage dans la robotique, un secteur particulièrement touché par les sanctions occidentales.
De plus, des projets collaboratifs au sein des industries créatives (films d’animation, jeux vidéo ou encore mode) sont envisagés. Une des sessions du forum a même été dédiée aux studios de cinéma, où des idées de films ont été examinées. Plus qu’un partenaire économique, le Kremlin voit donc en Bangkok un débouché pour son soft power, et un partenaire chez qui investir dans les prochaines années. Par ailleurs, le cinéma thaïlandais devenant de plus en plus dynamique et présent sur la scène internationale, bénéficier du soutien de nouveaux investisseurs, voire même de sociétés de production russes, serait une manière de se diffuser auprès d’un public plus large.
Si les différents projets mentionnés aboutissaient, la Russie obtiendrait une voie d’accès privilégiée pour les marchés de l’ASEAN, le Kremlin étant à la recherche d’un tel partenariat avec la Thaïlande depuis plusieurs années. Si des pays comme l’Indonésie, Singapour ou encore le Viêtnam ont des accords particuliers avec la Russie, et l’Union Economique Eurasiatique, Bangkok n’a pour l’instant pas exploré cette possibilité. Pourtant, l’ASEAN comme l’UEE ont mené des actions communes pour intensifier leurs relations économiques, dans un effort d’intégration panasiatique qui intéresse vivement Moscou. Dès lors, il est tout à fait possible que ce premier forum d’investissement convainque l’Etat thaï de franchir l’étape de la normalisation ; après tout, comme mentionné plus tôt, le besoin d’avoir un cadre juridique concret pour les échanges commerciaux est un des principaux retours des participants. Le gouvernement thaï suivra donc, peut-être, la voie empruntée par ses voisins sud-est asiatiques dans les dernières années.
Une semaine après le forum, Bangkok et Moscou ont mené des consultations sur les questions consulaires entre leurs deux pays. Si ces consultations n’ont pas amené de changements significatifs, elles montrent le soin apporté, par la diplomatie russe, à son partenaire thaï. En définitive, les efforts de coopération entre les deux pays se multiplient, et risquent de s’intensifier dans les prochaines années.
À propos de l'auteur
Enzo PADOVAN
Biographie non renseignée



