Azerbaïdjan
Politique intérieure
Religion

Islam en Azerbaïdjan : de l’effervescence religieuse post-indépendance à une forme de sécularisation loyaliste « néo-monarchique »

Publié le 11/12/2025
4 min de lecture
Par Morgan Caillet
Note d'analyse
Islam en Azerbaïdjan

Islam en Azerbaïdjan

Ce travail analyse l’évolution de la place de l’Islam en Azerbaïdjan depuis l’indépendance du pays au début des années 1990. Les tentatives d’instrumentalisation politique en France du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan se sont évidemment accompagnées d’un discours présentant le facteur religieux comme fondamental dans ce conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Pourtant, ce pays connaît depuis 20 ans, sous le poids de la répression politique, un retour de l’islam à la clandestinité. Il s’agit d’un nouvel islam parallèle, dans une forme néanmoins assez différente de celle que cette religion avait connu durant la période soviétique. Il s’agit ici de rappeler la vitalité religieuse que l’Azerbaïdjan a connu au moment de l’indépendance, période qui a correspondu au déclenchement du conflit avec son voisin arménien. Mais aussi de revenir sur les caractéristiques particulières de la sécularisation à l’azerbaïdjanaise sous la gouvernance de la famille Aliev, expliquant ce retour progressif à la clandestinité, et les risques que cette situation présente désormais pour le pays.

Intro

I- L’ « islam parallèle » de la période soviétique et ses conséquences en terme de pratique religieuse

II – La vitalité religieuse post-soviétique et la restructuration du paysage religieux

III – La sécularisation azerbaïdjanaise sous le régime « néo-monarchique » de la famille Aliev

Un nouvel « islam parallèle » en Azerbaïdjan ?

L’éclatement de l’URSS en 1991 a provoqué un profond remaniement identitaire dans l’ensemble des ex-républiques socialistes soviétiques du Caucase et de l’Asie centrale, auquel n’a pas échappé l’Azerbaïdjan, riche d’une longue histoire multiculturelle, situé au carrefour des mondes européen et asiatique, et formant une zone tampon entre le monde turco-iranien au sud et russe au nord. Ce pays largement sécularisé depuis le 19ème siècle, au cours duquel s’est constituée la nation azerbaïdjanaise, s’est ainsi extirpé du bloc soviétique et de sa répression contre toutes les formes d’expression religieuse, au moment de l’échec de la Perestroïka, dans un contexte de conflit territorial avec l’Arménie qui s’est réactivé en 1988, et de développement économique sans précèdent grâce à ses ressources pétrolières et à la signature en 1994 du « Contrat du Siècle » avec un consortium de compagnies occidentales.

La disparition du système soviétique, marqué par l’athéisme scientifique et le matérialisme dialectique, a inauguré une période de recherche de nouveaux modèles identificatoires et de renouement avec les racines culturelles ancestrales. Cette riche période de restructuration du paysage religieux de l’Azerbaïdjan est ainsi caractérisée par l’opposition d’acteurs se disputant le sens des pratiques et du message coranique et leurs interactions avec une population à 97 % musulmane présentant la singularité à la fois d’être composée de deux tiers de chiites et d’un tiers de sunnites et de souhaiter se réapproprier les idéaux modernes préexistants à la chute de l’URSS. Cette zone frontière a été, parallèlement à l’arrivée de nouveaux courants islamiques étrangers provenant d’Iran, de Turquie et du monde arabe, bousculée par des enjeux internationaux cruciaux que l’on pense aux événements du 11 septembre 2001 et des guerres « contre l’axe du mal » en Irak et en Afghanistan portées par l’idéologie du « choc des civilisations », à la « crise des caricatures » de la fin des années 2000, puis des « Printemps Arabes » au début des années 2010, et enfin du conflit en Syrie. Ce contexte global a évidemment interagi avec une situation de reconstruction du système politique azerbaïdjanais autour d’un fonctionnement clanique et d’une succession dynastique du pouvoir au sein de la famille Aliev dès 2003.

La seconde guerre du Karabakh entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie a fait l’objet en France de tentatives d’instrumentalisation politique à des fins électoralistes, par le biais de discours présentant le facteur religieux comme fondamental dans ce conflit pourtant avant tout territorial. Il est donc nécessaire de dresser un court bilan de l’évolution des relations entre le politique et le religieux dans ce pays du sud-Caucase en focalisant sur sa religion principale, l’islam, dans la diversité de ses courants, et d’apporter des éléments de compréhension des déterminants et des caractéristiques de la politique de sécularisation des autorités post-soviétiques d’Azerbaïdjan.

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À propos de l'auteur

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Morgan Caillet

Morgan est socio-anthropologue de formation, diplômé de l’IEP d’Aix en Provence en Management interculturel et médiation religieuse et de l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques en gestion de projets internationaux. Il mène une recherche indépendante sur la résolution des conflits et la construction de la paix dans la région sud-caucasienne.

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