Equipe de veille Russie: Arnaud Huss, Nicolas Girard, Corentin Delon, Anastasia K., Erwann Leyral, Emeline Palvany, sous la direction d’Ilinka Léger et Enzo Padovan.
16/01/2023 : Artyom Uss, fils du gouverneur du Kraï de Krasnoyarsk, a demandé son extradition vers la Russie – Enzo Padovan
Le 16 janvier, Artyom Uss, entrepreneur russe détenu en Italie depuis le mois d’octobre, a demandé officiellement à être extradé vers la Russie, et non pas vers les Etats-Unis. Selon le journal italien La Repubblica, il est accusé d’avoir essayé de faire entrer clandestinement, sur le territoire russe, du matériel militaire américain ainsi que de l’essence en provenance du Venezuela. Il est important de noter que cette affaire a une portée politique conséquente ; Alexander Uss, père du détenu, est aussi le gouverneur du Kraï de Krasnoyarsk, une région russe située en Sibérie.
L’arrestation de cet entrepreneur, qui date du 17 octobre 2022, avait été confirmée dans un tweet par l’ambassade russe en Italie, indiquant qu’elle résultait d’un mandat de recherche américain, justifiant donc sa potentielle extradition outre-Atlantique. L’agence de presse gouvernementale russe TASS a révélé des informations supplémentaires sur cette affaire : peu de temps après son arrestation, Artyom Uss avait déjà refusé une première proposition d’extradition des Etats-Unis. Pourtant, TASS expliquait, dans un autre article, que l’entrepreneur était aussi recherché par les autorités de son pays. Le 28 octobre, la Russie avait placé son nom dans la liste des individus recherchés, l’accusant de blanchiment d’argent. S’il était rendu à la justice russe, Artyom Uss pourrait être condamné à une peine maximale de 7 ans d’emprisonnement, et une amende d’un million de roubles.
17/01/2023 : Le ministre de la Défense russe annonce une augmentation d’effectif des forces armées de la Fédération de Russie – Corentin Delon
Le 17 janvier, le média Vedomosti a relayé la déclaration Telegram du ministre de la Défense russe annonçant une augmentation significative des effectifs militaires à l’horizon 2026. Le ministre de la Défense russe Sergueï Choïgou a indiqué via le Telegram ministériel avoir «tenu une réunion avec les adjoints du ministre de la Défense de la Fédération de Russie, les commandants en chef des forces armées et les commandants sur la mise en œuvre de la décision du président de la Fédération de Russie d’augmenter le nombre des forces armées à 1,5 million de militaires».
Le gouvernement russe annonce également via la déclaration que ce n’est pas «possible d’assurer la sécurité militaire de l’État et de protéger les nouveaux sujets et les installations critiques de la Fédération de Russie {sans renforcer} les éléments structurels clés des forces armées». Les dynamiques mises en place pour ce plan de réorganisation s’articulent, principalement, sur la création de nouvelles associations territoriales stratégiques interservices, un recrutement actif et une amélioration des formations militaires.
18/01/2023 : L’ambassade russe d’Estonie suspend temporairement les renonciations à la citoyenneté russe – Nicolas Girard
Le 18 janvier, l’ambassade russe de Tallinn (Estonie) a annoncé sur son site internet la suspension temporaire de l’enregistrement des demandes de renonciation à la citoyenneté russe. D’après le journal russe pro-gouvernemental RiaNovosti, cette suspension fait suite à la nécessaire réorganisation des services consulaires, après demande par les autorités estoniennes de diminuer les effectifs de diplomates et personnels techniques russes. Selon le média pro-occidental RadioSvoboda, cette demande de réduction fait suite à des demandes similaires des autorités russes concernant les personnels consulaires estoniens en Russie.
Pour RadioSvoboda, la suspension des renonciations à la citoyenneté russe est également un moyen pour limiter le nombre de demandes de nationalité estonienne, de la part de citoyens précédemment russes. En effet, l’Estonie ne reconnaît pas la double nationalité. Il faut donc renoncer à sa nationalité précédente lors du changement. Depuis le début du conflit en Ukraine, toujours selon RadioSvoboda, les demandes ont fortement augmenté.
18/01/2023 : Evgueni Prigojine annonce que Youtube sera bientôt «fermé» en Russie – Anastasia K.
Le 18 janvier, l’homme d’affaires à la tête de la société militaire privée Wagner, Evgueni Prigojine, proche du Kremlin, a annoncé que Youtube, qu’il appelle «la peste informationnelle», sera prochainement fermé en Russie. Il a précisé que chaque personne qui l’utilise sera «repérée» et «sanctionnée». En effet, selon lui, 40% du contenu sur Youtube serait «politisé» et «orienté contre la Russie». Cependant, une grande partie de l’administration du président russe serait opposée au blocage de Youtube. Prigojine a alors qualifié ces personnes de «traîtres […] qui vivent, partent en vacances et élèvent leurs enfants à l’étranger, mais aussi visionnent des chaînes Youtube pro-ukrainiennes», rapporte News.ru. Il ajouté que ces derniers souhaitaient que la Russie perde la guerre afin que les «Américains viennent tout réguler». Néanmoins, il considère que «cela n’arrivera pas», et que ces «traîtres» reviendront vers le Kremlin où «la massue de Wagner les attendra».
Il estime que les réseaux sociaux Vkontakte et Odnoklassniki, ainsi que Rutube (l’équivalent russe de Youtube, appartenant à Gazprom media) pourraient être une alternative. Néanmoins, les blogueurs et l’opposition russes affichent leur mécontentement en rappelant «la mort» de Rutube, qui a subi une puissante cyberattaque peu après avoir connu une vague de popularisation en mai 2022. Il faut noter que Rutube fait partie de la mise en œuvre d’une politique de substitution des produits importés, renforcée depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022 et le départ de très nombreuses marques étrangères du sol russe.
Enfin, la question de Youtube pourrait être regardée de près, si cette plateforme continue à violer «systématiquement» et «consciemment» la loi russe, a annoncé à Rbc.ru le directeur de Gazprom-media, Alexandr Jarov. Par ailleurs, il a ajouté qu’en cas de blocage, une partie des utilisateurs continuerait tout de même à accéder à la plateforme grâce à l’utilisation des VPN.
18/01/2023 : Les gardes-côtes américains ont détecté un vaisseau russe dans les eaux d’Hawaï – Enzo Padovan
Le 18 janvier, la Garde côtière des Etats-Unis a publié un communiqué de presse, révélant qu’un bateau russe circule depuis quelques semaines dans les eaux d’Hawaï. La garde côtière du quatorzième district américain (qui s’occupe d’une grande partie des îles du Pacifique appartenant aux Etats-Unis, notamment Guam ou l’Etat d’Hawaï) pense qu’il s’agit d’un vaisseau-espion russe. Une vidéo fut partagée sur le compte Twitter des gardes-côtes d’Hawaï ; cette dernière montre le navire en plein ravitaillement de carburant, au large de l’île la plus méridionale de l’archipel.
En vertu du droit international, un tel bateau peut circuler librement dans la Zone Economique Exclusive américaine, mais c’est bel et bien la longueur de ce séjour qui soulève des interrogations. La vice-secrétaire de presse du Pentagone, Sabrina Singh, s’est exprimée sur ce problème le 19 janvier, dans le cadre d’une conférence. «Nous n’avons remarqué aucun comportement dangereux ou non-professionnel, et nous nous attendons à ce que les russes opèrent dans la région en respectant le droit international». Les gardes-côtes se contentent ainsi, pour l’instant, de surveiller l’activité du navire à distance.
18/01/2023 : Sberbank a annoncé le retour de son activité en Crimée annexée malgré les sanctions occidentales – Emeline Palvany
Le 18 janvier, la première banque russe, Sberbank, a annoncé sur son site internet le retour de son travail sur la péninsule de Crimée, huit ans après avoir abandonné le territoire suite à l’annexion de la Russie et près d’un an après les sanctions occidentales. «L’installation des premiers guichets automatiques de la banque ont déjà commencé et le réseau d’appareils en libre-service commencera à fonctionner dans toute la péninsule », explique le service de presse de la banque. Mikhail Rajojaev, gouverneur de Sébastopol affirme d’ores et déjà que la ville sélectionne un endroit à l’installation des bureaux Sberbank. Via sa chaîne Telegram, le chef proclamé de la république de Crimée, Sergey Akyonov, a salué l’impact positif de cette initiative sur « le climat financier et d’investissement, du développement de l’économie et de la sphère sociale ». Selon Anton Imennov, dont les propos furent rapportés par l’agence de presse TASS, associé senior chez Pen & Paper, les sanctions ont rendu les activités en Crimée « moins toxiques » pour les entreprises se recentrant sur les marchés locaux.
19/01/2023 : Le char T-14 « Armata », la nouvelle arme russe en Ukraine ? – Erwann Leyral
Le 19 janvier, le compte Twitter officiel du ministère de la Défense du Royaume-Uni annonçait un probable déploiement de chars T14 russes en Ukraine. Le journaliste russe pro-gouvernemental Vladimir Soloviev avait précédemment publié une vidéo, qu’il a diffusée sur son canal Telegram, annonçant que des chars de modèle Armata se dirigeaient vers l’ouest. Les chars de combat constituent une pièce maîtresse dans les conflits modernes depuis la Seconde Guerre mondiale, où les chars russes, plus adaptés aux températures septentrionales, avaient pris l’avantage sur les forces allemandes. Alors que l’OTAN envisage de nouveaux envois de matériel en Ukraine, incluant des véhicules de combats, l’utilisation de chars «de troisième génération» (selon Rustem Klupov, vétéran du renseignement militaire sur Soloviev Live) peut constituer un bouleversement. Bien que ce déploiement demeure bien incertain, le renseignement britannique lui accorderait un certain crédit. Selon l’agence de presse pro-gouvernementale russe TASS, en 2016, les renseignements britanniques auraient qualifié le T-14 comme «le plus révolutionnaire des chars», mais il n’en demeure pas moins qu’une part d’ombre subsiste à Moscou. En effet, le rapport des renseignements britanniques du 19 janvier 2023 considère encore ce char comme expérimental, victime de «problèmes de manufacture». Ce char présente ainsi un risque pour Moscou, que le service de renseignement de la couronne suspecte de déployer cette arme en ayant «des desseins propagandistes».
20/01/2023 : 8,5 % des entreprises occidentales auraient quitté la Russie depuis le début de la guerre – Arnaud Huss
Le vendredi 20 janvier, une étude suisse a révélé que moins de 10 % des entreprises occidentales engagées dans les sanctions européennes et du G7 à l’encontre de la Russie, ont quitté la Russie. Selon Meduza, cette étude a été réalisée par Simon Evenett, professeur d’économie à l’institut international du Management (IMD). Selon l’ORBIS (organisme de base de données suisse), il existait en Russie, en avril 2022, pas moins de 36 000 entreprises, dont environ 3400 sont des entreprises étrangères. Sur ces 3400 entreprises, 1400 étaient des sociétés mères, et sur ces 1400, seulement 120 (8,5 %) sociétés ont vendu leurs parts, fin novembre 2022. La plupart des entreprises ayant quitté le marché russe, étant des grandes entreprises comme Mcdonald’s, Nissan ou Starbucks.
L’étude de M. Evenett constate que les entreprises étrangères, même occidentales, résistent face à la pression de leurs gouvernements, mais ce maintien du commerce pourrait être temporaire (car elle pourrait augmenter à l’avenir, avec la dureté des sanctions). Les entreprises sont également réticentes à perdre des marchés avec des clients ne participant pas forcément à la guerre et rencontrent des difficultés à rompre des contrats de longue date et à trouver de nouveaux marchés. Selon le Moscow Times, les entreprises européennes et du G7 ayant quitté le marché russe représentent seulement 18 % des entreprises américaines présentes en Russie, tandis que les chiffres baissent à 15 % pour les entreprises japonaises, et 8,3 % pour les entreprises européennes.
